Déicide | By : Andarta Category: French > Anime Views: 1075 -:- Recommendations : 0 -:- Currently Reading : 0 |
Disclaimer: I do not own the anime/manga that this fanfiction is written for, nor any of the characters from it. I do not make any money from the writing of this story. Only the OC are mine. |
Genre : Euh ? Espionnage, Angst, Yaoi, du tout et n’importe quoi…
Couple : un semblant de GMxCamus
Note : Annette toujours en bêta ! ! Michi pour tes conseils, Annette ! ! ^^
DEICIDE
Chapitre 4
– Sibérie orientale, au même moment –
D’un mouvement de balancier, Laïloken jeta sur son épaule l’imposant sac de haricots secs, en assura l’équilibre et se mit en marche. Il sortit du baraquement et se dirigea d’un pas ferme vers celui qui abritait le réfectoire. Il en était à son quatrième voyage de la matinée mais il ne s’en plaignait pas. C’était là l’une de ses tâches. Il fixait droit devant lui, ignorant le regard des autres renégats. Il savait parfaitement que la façon dont le traitait le Grand-Maître, ajouté à sa grande discrétion, avait immédiatement soulevé des interrogations parmi la majorité des hommes. Son masque ne facilitait pas le contact et ses silences butés avaient fini par décourager ceux qui avaient tenté le dialogue. Du coup, Laïloken se trouvait seul et isolé au milieu de la troupe de renégats, ne donnant absolument pas l’impression de vouloir s’intégrer. Par conséquent, les rumeurs allaient bon train, la plupart étant d’ailleurs infondées. Bien sûr, certains pensaient qu’il était un Chevalier d’Or, quelques-uns songeaient que sa puissance n’était qu’une chimère et qu’il n’avait jeté que de la poudre aux yeux de leur chef, mais d’autres n’hésitaient pas à le railler, disant à qui voulait l’entendre qu’il devait avoir certains talents particulièrement appréciés pour que le Grand-Maître soit aussi délicat avec lui.
Son sixième sens tira l’alarme et il s’immobilisa, le sac toujours sur l’épaule, droit et fier, analysant calmement la situation. Il y avait un groupe d’hommes qui l’entouraient avec un air mauvais sur le visage et ils semblaient prêts à en découdre… Laïloken garda le silence, attendant simplement la suite, ce qui avait tendance à agacer franchement ses éventuels adversaires. L’un d’eux, encore moins patient que les autres, prit la direction des opérations :
– Dis-moi, le rouquin, mes bottes sont boueuses et comme tu me sembles plutôt doué pour le cirage de pompes, tu pourrais faire les miennes et celles de mes potes en passant. Qu’est-ce que vous en dites, les gars ?
Les autres se mirent à rire grassement devant la plaisanterie de leur ami. Laïloken ne daigna pas répondre et fit un pas en avant pour reprendre sa route, comme s’ils n’étaient que de vulgaires insectes. Il n’allait certainement pas accorder de l’importance à ces imbéciles heureux ! Il avait sa fierté, tout de même… Sans compter qu’il savait pertinemment qu’aucun d’entre eux ne pouvait rivaliser avec lui. Où était l’honneur à étaler des types aussi faibles que des novices du Sanctuaire ?
Mais l’autre ne le prit pas ainsi. Il le perçut comme un affront et non comme un geste de miséricorde et il haussa aussitôt le ton, voulant faire immédiatement réagir ce moins que rien :
– Hé ! Où tu vas comme ça ? Je t’ai dit quelque chose, face vérolée ! Et une fois que tu auras fini ça, tu iras nettoyer les chambres et les latrines ! Et il faudra que ça brille au point que tu puisses te voir dedans ! Allez ! Exécution !
Laïloken inspira à fond pour éviter de mettre son poing directement dans la figure de cet impertinent. Il devait garder son calme, il était le Verseau, le Chevalier d’Or le plus stoïque du Zodiaque… enfin pour le moment…
– Mais après toi… quand j’en aurai toutefois fini avec mes propres tâches.
Le provocateur se planta en face de lui en le regardant avec une malveillance manifeste et il rétorqua vivement :
– Ecoute-moi bien, le larbin, parce qu’il me semble que tu n’as pas tout compris : ici, tu n’es rien et tu ne seras jamais rien. Alors en attendant, va falloir que tu t’habitues à faire profil bas tant que tu ne nous auras pas prouvé que tu n’es pas un pique-assiette. Autant te rendre utile en tant qu’agent d’entretien pendant que les vrais guerriers vont au combat, n’est-ce pas ?
Non, ne le congèle pas sur place, ça ne se fait pas… Même si cet imbécile le mérite amplement… Caaaallllmmme-toi… Ne t’énneeerrve pas… Non, trop tard, je suis é-ner-vé ! Laïloken posa son sac de haricots secs dans la neige et rejeta d’un geste vif une mèche rouge qui le gênait. Il attrapa au vol la main de l’importun qui voulait lui arracher son masque et d’un mouvement fluide, le fit tomber au sol. Il ne prit même pas la peine de se mettre en garde et il grinça entre ses dents :
– Voilà ta vraie place. Et constate par toi-même l’écart qu’il y a entre toi et moi. Tu ne sais pas qui je suis, alors abstiens-toi, c’est un conseil que je te donne.
En voyant leur camarade en difficulté, les autres se jetèrent aussitôt en avant pour lui prêter main forte. Cette fois, Laïloken suscita légèrement son cosmos laiteux et s’élança à la vitesse de la lumière. Pour ses adversaires, il donna l’impression de se volatiliser pour réapparaître une vingtaine de mètres plus loin de façon instantanée. Ils s’immobilisèrent, stupéfaits, hésitant sur l’explication à donner mais la voix glaciale de Laïloken s’éleva, fixant pour de bon la situation :
– Je me suis déplacé à la vitesse de la lumière. Pour moi, vous courez aussi vite qu’un escargot. Imaginez donc ce que ça donne dans un combat. Maintenant, laissez-moi tranquille ou je me fâche pour de bon.
Il revint vers la troupe, entouré de son cosmos lumineux qu’il n’avait pourtant pas poussé à pleine puissance, loin de là. Il ne voulait pas qu’ils sachent ce dont il était vraiment capable, juste qu’ils restent à leur place et qu’on ne l’ennuie plus. Il était un Gold, que diable, pas le premier venu ! Vu la tête de ses adversaires, ceux-ci semblaient avoir compris leur méprise.
Il reprit son sac et continua son chemin sans ajouter un mot de plus. Son aura s’était éteinte graduellement et désormais, on le regardait avec un peu plus de respect. Laïloken poussa un soupir et ferma les yeux un bref instant. Et voilà qu’il avait une migraine ! A force de se concentrer sur ses pensées pour faire barrage au Grand-Maître, la moindre contrariété virait immédiatement à la catastrophe. Oh par Athéna ! Il aurait dû songer à suivre une formation accélérée auprès de Mü ou de Shaka juste après leur résurrection à tous, ça l’aurait vraiment aidé en ce moment…
Il porta une main à son front endolori par réflexe mais la peine devint plus intense, plus précise, comme si une certaine zone de son cerveau était ciblée. Il s’immobilisa brutalement, avant de se retourner d’un bloc, ses cheveux suivant le mouvement dans une magnifique ondulation flamboyante. Le sac de haricots secs tomba dans la neige, déversant son contenu en vrac, alors que statufié, Laïloken, eut une nouvelle fois l’impression qu’on lui vrillait le crâne à l’aide d’un foret enflammé. Tous ses sens, du premier au septième, lui indiquaient qu’on cherchait à l’agresser. Et il ne pouvait accuser le Grand-Maître, même lui était plus subtil dans ses perpétuelles tentatives d’intrusion mentale. Mais que se passait-il donc ? Il ferma les yeux alors qu’un sentiment d’oppression lui gagnait la poitrine.
La souffrance revint, plus violente, et il se prit les tempes entre les mains, incapable de contenir un gémissement de douleur. Son cerveau allait être broyé à force… Son cosmos s’enflamma brutalement, sans même qu’il ne l’ait suscité, incontrôlable, glacial et instable. De familier, il lui sembla d’un seul coup étranger, hostile, haineux, charriant encore plus de peines enfouies que le sien et il eut l’impression que son corps entier rejetait cette aura alors que cette dernière voulait s’incruster en lui. Il secoua la tête frénétiquement, cherchant à se libérer de l’étau implacable qui l’enserrait et lui coupait le souffle. Il ne voulait pas ! Il refusait de subir cette intrusion ! Car il s’agissait bien de cela ! Et qu’importe de qui elle venait !
Il luttait de toutes ses forces et son corps en subissait largement le contrecoup. Toute sa musculature se tendait, au bord de la déchirure tandis que son cœur était parti pour battre des records de vitesse. Son esprit, partagé entre la paralysie sous la douleur et la mobilisation dans un seul objectif, finit par comprendre qu’il valait mieux tenter d’analyser un minimum la situation. Quelque chose ou quelqu’un essayait de le contacter de force et était même parvenu à embraser son cosmos. Seulement ce processus était devenu extrêmement douloureux et ce n’était pas normal. Pourquoi ?
Laïloken ouvrit les yeux et s’écroula à genoux devant l’énormité de la situation. Il ne comprenait plus rien. Ce n’était pas son cosmos blanc qui l’entourait, non… C’était le cosmos doré… Celui d’avant… Celui qu’il avait encore lorsque Milo… Il ferma les yeux et des larmes se mirent à couler sous son masque alors que ses bras retombaient le long de son corps, dans un geste de total abandon. Il brûlait… La douleur était insupportable… Son esprit se fracassait encore et encore alors que son cœur se gelait un peu plus… Le temps n’avait plus aucune importance, désormais… Il voulait qu’on l’abatte, tout de suite, pour ne plus ressentir cette souffrance perpétuelle, ce cycle infernal qui revenait sans cesse le hanter. Il entendait un rire qui roulait comme répercuté par l’écho et une voix rauque qui répétait : tu m’appartiens désormais… Et ces affreux yeux blancs venaient s’ajouter à la ronde folle qui le brisait un peu plus encore.
Aidez… Moi… S’il… Vous… Plaît… Ai…dez… Moi… Une âme déchirée qui sanglotait en appelant désespérément au secours… Il se perdait. Plus le cosmos doré s’intensifiait, plus il s’enfonçait dans l’abîme. Il ne sentit qu’à peine les présences autour de lui, les voix qui l’interpellaient, les tentatives de contact par télépathie. Laïloken partait.
Puis il y eut comme une sensation familière sur l’ensemble de son corps… Comme si on le protégeait… Comme s’il portait une armure… Son armure… Le choc le fit revenir brusquement à lui. Aquarius ! ! Voilà d’où venait l’appel ! ! C’était sa propre armure qui venait de le contacter ! Mais pourquoi ? Que se passait-il à la fin ? Avait-on tenté de la réattribuer contre son avis ? A qui ? Pourtant, le Pope et Athéna savaient pertinemment qu’il ne pouvait y avoir qu’un unique prétendant à l’armure du Verseau et c’était lui, puisqu’elle était sa constellation protectrice… En aucun cas, Aquarius n’accepterait de protéger un autre que lui sans son consentement… Son cœur se serra : voulait-on donc effacer toute trace de lui au Sanctuaire pour vraiment faire croire à sa traîtrise ?
Et dans un autre éclair de lucidité, il comprit ce qu’impliquait une telle sensation. Son armure l’appelait, certes, mais elle cherchait aussi à le rejoindre ! Et ça, il ne le fallait pas ! Il devait la repousser à tout prix ! Il en allait de sa mission ! Même s’il était stupidement soulagé de savoir qu’Aquarius avait rejeté son prétendant, il n’en demeurait pas moins qu’il ne pouvait toujours pas la revêtir. Mais comment le lui faire comprendre ?
Il se concentra encore, malgré la douleur, malgré son épuisement, malgré tout ceux qui l’entouraient et cherchaient à le sortir de sa transe. Il trouva un fil fragile, délicat, le menant tout droit à l’âme d’Aquarius… Et là, Laïloken eut un grand moment de découragement. Il ne savait trop comment faire passer son message. Il cherchait encore une solution lorsqu’il perçut quelque chose de ténu qui ressemblait vaguement à une sensation et il comprit que c’était l’armure qui lui " parlait ". Il tenta de lui répondre, mais pour lui, habitué à enfouir ses émotions, c’était loin d’être évident. Au bout de plusieurs essais infructueux, il parvint à un embryon de " dialogue ". Cela ressemblait à des variations du rythme cardiaque, à des frissons et autres réactions plus ou moins corporelles plutôt discrètes. Il ne contrôlait pas grand-chose : il formulait juste sa pensée en y associant une forte émotion et son corps faisait le reste. Il ne savait pas comment cela fonctionnait, mais Aquarius semblait comprendre.
Elle comprit si bien d’ailleurs qu’elle finit par se retirer de sa psyché. Laïloken ne ressentit plus la sensation apaisante et protectrice de l’armure l’enveloppant physiquement et il eut l’impression de se retrouver nu. Le cosmos doré s’effondra sans prévenir et il se sentit enfin soulagé pendant quelques instants de l’énorme pression. Des filaments blanchâtres commencèrent à apparaître dans l’aura qui vacillait, pulsant au même rythme lent de son cœur malmené.
Cet instant de grâce ne dura pas longtemps. Le cosmos doré rongé par les filaments de plus en plus nombreux et volumineux se tassa si bien qu’il finit par disparaître pour de bon, alors que le cosmos laiteux explosa de toute sa puissance dans un grondement de tonnerre, balayant absolument tout ce qui se trouvait à proximité sur une centaine de mètres à la ronde. Trois bâtiments entiers furent soufflés comme des fétus de paille sous la force du blast. Tout ce qui se situait en contact immédiat avec Laïloken gela séance tenante, alors que sous lui, se propageait une épaisse plaque de glace au-dessus de la couche de neige. Le cosmos blanc continua à flamboyer durant plusieurs minutes, vidant son propriétaire de ses dernières forces avant de se désagréger dans un poudroiement final de cristaux de glace du plus bel effet.
Une fois l’ultime parcelle de son aura disparue, Laïloken bascula sur le côté et s’échoua, totalement inerte, sur la plaque de glace qu’il avait involontairement créée. Il ne donnait plus signe de vie. Ses longues mèches rouges ressemblaient à de sinistres coulées de sang et son corps si svelte paraissait bien fragile, étendu là, comme une poupée disloquée. Aucun des renégats n’osait l’approcher de crainte de se retrouver encore éjecté contre un bâtiment, voire pire, congelé sur place, comme cela semblait être le cas pour la dizaine de malheureux qui n’étaient plus que des statues de glace à la triste figure… Car ils en étaient tous conscients désormais : Laïloken détenait une puissance incroyable. Mais encore une fois, peu d’entre eux avaient compris ce qu’il venait de se passer ; et s’il n’y avait pas encore de ruée pour une mise à mort en règle, c’était tout simplement parce qu’ils étaient encore trop abasourdis par ce qu’ils avaient vu.
Le premier à réagir fut le Grand-Maître en personne. Il se releva, secoua son épais pantalon couvert de neige et avança calmement vers sa nouvelle recrue. Oh ! Elle pouvait être fière d’elle ! Elle venait de détruire le centre du camp et de tuer dix abrutis de la puissance d’un novice en début de formation ! Et tout ça en un seul coup ! ! Bravo ! Félicitations, Laïloken ! ! Quelle brillante démonstration de maîtrise de soi ! ! Une sérieuse discussion serait à envisager sur leur place respective et il allait devoir mettre le holà tout de suite… Si l’ex-Chevalier d’Or commençait à faire étalage de ses capacités, il ne tarderait pas à avoir des conflits d’autorité avec ses hommes qui le mettraient directement en concurrence avec ce dernier. Il fallait tuer dans l’œuf cette éventualité. D’autant plus, qu’il soupçonnait que cette explosion de cosmos de l’ancien Gold n’était pas franchement voulue étant donné ses réactions contradictoires.
Il allait se pencher sur Laïloken lorsqu’une voix s’éleva sur sa droite :
– Grand-Maître… Il est dangereux, il a voulu nous trahir… Il faut s’en débarrasser…
Ce dernier regarda Laïloken étendu à ses pieds. Il respirait, mais c’était à peine visible. Il s’accroupit, écarta quelques mèches de cheveux qui étaient tombées en travers du masque et s’assura que Laïloken n’avait rien de grave à première vue. Il répondit simplement :
– Il est inutile de s’emballer.
Un autre homme reprit :
– Mais il en a tué dix d’entre nous ! Il a détruit des bâtiments ! Et tout cela devant nos yeux ! Et la prochaine fois, ça sera quoi ?
Le Grand-Maître releva la tête et observa ce qui restait des malheureux transformés en statues de glace. Un Chevalier des Glaces, lui avait-il répondu lors de leur première rencontre. Le Verseau en personne, il n’avait pas menti. Ses yeux d’ambre se posèrent ensuite sur la troupe qui se rassembla d’instinct sous ce feu scrutateur. Il secoua lentement la tête alors que son expression demeurait indéchiffrable :
– Ce n’était guère volontaire de sa part. Je vais en discuter avec lui dès qu’il reprendra conscience.
– Mais… Il a trahi notre position ! ! Si jamais il y avait un guerrier d’un Sanctuaire qui passait dans le coin, on est cuit ! !
Le Grand-Maître ne cilla même pas, restant absolument de marbre. Il se contenta de les fixer froidement, durant un long moment, avant de revenir sur Laïloken. Il remarqua alors que le masque s’était légèrement décroché, lui laissant deviner le velouté d’une joue, malgré les ombres persistantes causées par la chevelure et le rebord métallique. Il tendit la main et hésita. Il pouvait profiter de la situation et enlever le masque pour voir le visage de Laïloken… Mais quel intérêt ? Cela serait trahir sa confiance, sans parler du fait qu’il ne pourrait y lire aucune expression… Alors, dans un geste précis et doux, il remit le masque en place, frôlant au passage la chevelure flamboyante.
– A mon avis, son explosion de cosmos a dû se sentir de très loin. Et ce qui est fait est fait.
Il retourna Laïloken pour l’allonger sur le dos et le décolla du sol en le soulevant comme on le ferait d’une femme. Une fois debout, Le Grand-Maître se pencha en avant et s’arrangea pour amener Laïloken face à lui. Alors, dans un mouvement souple, il le fit remonter de plus en plus haut avant de le faire totalement basculer en travers de son épaule d’un geste parfaitement contrôlé. Une fois dans cette position, il sécurisa sa prise en lui enserrant les genoux d’un bras alors que son autre main atterrissait tout à fait par hasard sur la partie la plus charnue de l’ancien Chevalier d’Or. Le Grand-Maître ne put contenir son sourire ironique en évaluant la fermeté et le galbe des fesses si obligeamment placées à sa portée. Oh, il avait vraiment hâte de pouvoir y goûter, à cet ancien petit Gold…
En attendant… Il avait des ordres à donner :
– Que les groupes de reconnaissance partent immédiatement voir s’il y a un risque pour le camp.
Il désigna un ensemble d’individus et reprit :
– Vous, déblayez-moi les débris des baraquements et tout ce qui n’est plus récupérable. Ensuite vous commencerez à rebâtir avec l’aide de cet autre groupe une fois qu’ils seront allés chercher les matériaux nécessaires.
Il se retourna et s’adressa à un petit groupe de jeunes hommes encore pétrifiés :
– Vous quatre ! Occupez-vous avec dignité de ces malheureux qui ont perdu la vie.
Il se mit en marche, Laïloken sur l’épaule. Sa voix calme s’éleva encore une fois :
– Quant à ceux à qui je n’ai pas donné de tâche spécifique, qu’ils continuent leurs activités précédentes. Débrouillez-vous pour que tout fonctionne à peu près normalement.
Alors qu’il sentait les bras ballants de Lailoken se mouvoir dans son dos à chacun de ses pas, il entendit les renégats se remettre doucement en activité et le camp reprendre enfin vie. Avec un peu de chance, il n’y aurait plus de traces de l’incident le lendemain soir si tous s’y mettaient vraiment. Pourtant, il se demandait s’il n’allait pas devoir changer de site. Seuls les rapports des groupes de reconnaissance lui permettraient d’évaluer correctement le danger, mais rien ne l’empêchait de commencer à chercher un autre emplacement après le réveil et la discussion avec Laïloken.
Il entra dans le bâtiment où se trouvait la chambre de l’ancien Chevalier d’Or et remonta sans hésiter le minuscule couloir qui y menait, tout en lui tapotant allègrement les fesses, profitant largement de l’occasion. Musclé, il l’était très certainement, mais Laïloken était relativement léger pour sa taille, du coup, le Grand-Maître pouvait en deviner les trésors de souplesse, d’agilité et de nervosité. Des talents tout à fait adéquats pour les pensées vagabondes qui lui traversaient l’esprit alors que sa main s’était mise à caresser plus doucement les rondeurs appétissantes qu’elle apprenait à connaître.
Il pénétra dans la chambre et déposa l’inconscient sur le lit. Que faire maintenant ? Il était hors de question de lui ôter ce masque, il voulait absolument que ce soit Laïloken qui le fasse de lui-même. Une bonne partie des vêtements de ce dernier était en train de se mouiller sous l’effet de la fonte des cristaux de neige et des particules de glace qui y étaient restés accrochés. Mais la première urgence était de constater les dégâts. Le Grand-Maître n’avait détecté aucune blessure à première vue, mais Laïloken avait été tendu une bonne partie du phénomène, sans parler du gémissement de douleur qui lui avait échappé. Visiblement, il avait énormément souffert…
Tout en remontant délicatement le pull et T-shirt de sa nouvelle recrue, le Grand-Maître s’interrogeait encore sur cet événement. Il avait bien vu deux couleurs distinctes dans le cosmos : un doré et un laiteux, celui de Laïloken. Mais un Chevalier d’Or n’avait-il pas une aura dorée, justement ? Avait-on cherché à contacter Laïloken malgré lui ? Normalement, lorsqu’il y avait un contact télépathique, celui-ci n’était pas aussi invasif, aussi douloureux et brutal… Avait-on voulu le localiser, alors ? Que s’était-il passé exactement ? Pourquoi deux cosmos aussi différents ? Deux cosmos qui visiblement étaient entrés en conflit dans le corps même de Laïloken, comme si… comme si ces deux cosmos n’étaient que deux facettes de la même énergie… Cela ressemblait fortement à un rappel du passé… Un rappel, qui ne devait pas forcément provenir d’un ennemi, mais qui devait avoir été engendré à cause d’un événement majeur qui concernait Laïloken en tant que Chevalier… Quel genre d’événement dans ce cas aurait pu… ? !
Le Grand-Maître redressa la tête brusquement, comme frappé par la foudre, avant de se pencher de nouveau sur Laïloken et de scruter les orbites d’argent, comme s’il voulait en percer les secrets insondables. L’armure ? Il ne voyait que cela comme solution… Et c’était bien ce qu’il y avait de plus logique : le cosmos de Laïloken avait dû évoluer, il ne savait trop comment, mais, de fait, il était entré en conflit direct avec les résidus de celui qui restait dans l’armure… Et si l’armure l’avait contacté, cela ne pouvait signifier qu’une chose : Laïloken venait d’être renié par sa Cloth et elle ne lui avait fait aucun cadeau...
Il soupira profondément. C’était bien le moment… Il était suffisamment amoché comme cela. Mon pauvre ami… Ils ne vont rien t’épargner… Ils aiment se venger lentement, chez Athéna… Il prit sa main qu’il trouva glaciale et la frotta vigoureusement pour la réchauffer, inspectant d’un œil critique la peau pâle du ventre et du buste qu’il avait découverts. Sa friction se mua rapidement en caresse plus délicate et il finit par porter ses doigts sur cet abdomen qui se soulevait calmement à chaque inspiration. Il l’effleura et le trouva délicieusement chaud et doux. Il y posa plus largement la main et commença lentement à apprécier ce ventre musclé. Laïloken ne réagissait pas. Son souffle n’avait toujours pas varié, même si Galilée trouvait qu’il manquait d’amplitude. Sa main descendit jusqu’au pantalon qu’il déboutonna avant d’en descendre la braguette. Ainsi, l’ancien Chevalier serait plus à l’aise pour respirer… et lui pouvait en profiter au passage.
Avoir Laïloken si faible, si fragile, totalement à sa merci, c’était plus que ce qu’il ne pouvait en supporter. Il posa carrément ses deux mains sur lui, le caressant plus franchement, laissant ses doigts explorer les reliefs créés par une musculature détendue, appréciant la finesse d’un épiderme où il découvrait des cicatrices récentes, séquelles d’un combat qui avait dû être rude. Il posa ses lèvres sur l’une d’elles et l’embrassa doucement, avant d’en lécher le tracé avec soin, goûtant avec délice à ce corps qui lui était pourtant encore interdit. Il remonta un peu plus, explorant une autre preuve de bataille, alors que ses doigts se mirent à frôler les flancs offerts avec une lenteur démoniaque. Si seulement Laïloken pouvait être conscient et lui répondre en gémissant de plaisir… Il serait au paradis…
Il ne put résister à l’envie dévorante de savourer les deux petites gemmes roses encore endormies qui ornaient un athlétique torse d’albâtre. Il était vraiment séduisant… Trop d’ailleurs, il allait devoir garder un œil sur lui pour écarter les éventuels rivaux. Il avait décidé que Laïloken serait uniquement à lui… Ainsi, il pourrait le contrôler et veiller sur lui au plus près. Une telle puissance dans un corps aussi frêle… Qui aurait pu le soupçonner ? Si jamais il venait à l’esprit du Verseau de se mettre en concurrence contre lui, Galilée savait déjà qu’il ne pourrait faire face, pas avec un tel niveau… Il devait donc se l’enchaîner pour de bon.
Il sentit le souffle de Laïloken accélérer légèrement et, avec un sourire victorieux, il commença à picorer son cou de petits baisers légers, là où il y avait encore des traces de son début de strangulation. Ses mains continuèrent leur danse sensuelle sur le torse, le ventre et les flancs d’un Verseau dont la peau semblait chauffer de plus en plus. L’ancien Chevalier poussa un gémissement étouffé et sa tête bascula sur le côté, dégageant complètement l’accès de sa gorge à un Grand-Maître enchanté de l’aubaine. Il entreprit donc de la dévorer méthodiquement, y laissant même sa marque de propriété. Dommage que son pull et son T-shirt, roulés au niveau de l’attache de son cou, l’empêchaient d’aller fureter au niveau du creux de la clavicule. Quoique… Il pouvait tout aussi bien l’en débarrasser… Mais il préférait encore une fois que ce soit avec l’accord d’un Laïloken bien conscient.
Il délaissa la gorge pour aller s’occuper de nouveau des mamelons, qu’il commença à titiller, et les vit, cette fois, réagir alors que le souffle de Laïloken s’emballait. Il descendit encore, sa langue laissant des traînées humides là où il testait le goût de sa peau à tel ou tel endroit d’un ventre qui frémissait à son contact. Ses mains empoignèrent la ceinture du pantalon du Verseau et doucement, lui dégagèrent les hanches suffisamment pour que le vêtement soit enlevé facilement. Laïloken serra un poing contre le drap lentement alors que son corps se tendait peu à peu.
Galilée se redressa et regarda cet homme, dont la chevelure flamboyante coulait sur l’oreiller en de longues mèches serpentines et au corps de plus en plus dénudé. Son désir était plus vif que jamais et sa main se faufila à l’intérieur du pantalon, comme mue de sa propre volonté. Elle frôla le creux de l’aine et le trésor qui s’y nichait avant de se poser avec franchise sur la face interne d’une cuisse. Le Grand-Maître apprécia immédiatement la texture de l’épiderme délicat qu’il venait de découvrir et n’hésita pas une seule seconde à en explorer davantage, surtout en constatant que l’ancien Chevalier venait d’ouvrir les jambes sans même s’en apercevoir… Heureusement qu’il portait encore son pantalon…
Laïloken sentait qu’on le touchait. Son cou, son torse, son ventre et ses cuisses… Rien n’était laissé au hasard… Il bascula la tête en arrière en se mordant les lèvres au sang avec violence. Que se passait-il ? Il avait donc perdu conscience ? Il se sentait terriblement épuisé. Il pouvait à peine bouger. La peur le saisit brutalement. Cette situation ressemblait étrangement à ce qu’il avait enduré six mois plus tôt. Trop, d’ailleurs… Comme si tout ce qu’il avait vécu après n’avait été le fruit que de son imagination… Et s’il n’était toujours pas sorti de cet hôtel maudit ? Oh par Athéna… Cela voulait dire que… Les mains qui continuaient leur exploration, tout comme ce qui se promenait sur sa poitrine et qui était mouillé…
Milo ? ? ! ! Non ! ! ! Ce n’était pas possible… Milo ne pouvait lui faire une chose aussi monstrueuse… Et pourtant, ce qu’il ressentait était bien réel… N’en avait-il donc pas eu assez la première fois ? Sous l’effet du choc, Laïloken sentit son corps se ployer comme s’il se tordait de douleur par anticipation alors que son esprit repartait brutalement en arrière, se focalisant de nouveau sur toute l’horreur de la situation. Non, pas encore une fois… Pas ça ! C’était tellement douloureux, humiliant, avilissant… Ses mains se levèrent en tremblant dans le vide pour repousser son agresseur, sa respiration devint nettement difficile et sa tête oscilla d’un côté à l’autre de façon violente. Il poussa un cri plaintif, puis un sanglot épuisé lui échappa. Il devait sortir de sa léthargie. Il devait repousser Milo coûte que coûte…
Galilée, qui était en train d’embrasser consciencieusement le nombril du Verseau tout en flattant délicatement sa cuisse si chaude sous ses doigts, releva la tête en fronçant les sourcils et en arborant une expression contrariée. Pourquoi Laïloken venait-il de se tendre de cette manière ? Pourquoi ces plaintes et ces larmes ? Et ces gestes de défense ? Il décida d’en avoir le cœur net et tout en tentant de l’apaiser, il profita que les barrières mentales du Verseau soient abaissées pour explorer son esprit…
Tout revint avec une telle violence que le Chevalier d’Or ouvrit les yeux brusquement, le souffle coupé, le corps raidi par l’atroce sensation de se sentir toujours aussi souillé… malgré tout ce temps. Quand guérirait-il ? Probablement jamais… Il avait la nausée et la gorge nouée, alors que l’angoisse le tenaillait plus que jamais. Un frisson glacial le parcourut longuement et lui fit enfin reprendre conscience de la réalité… et des mains toujours posées sur lui. Le dégoût de lui-même, son malaise, la peur panique, les chocs successifs le firent enfin réagir. Il se redressa avec rudesse et d’un geste instinctif, il lança son poing pour frapper celui qui osait prendre autant de libertés avec lui sans son consentement.
Galilée, déjà profondément secoué par ce qu’il avait vu dans la conscience de Laïloken, évita de justesse le coup qui lui était destiné et se recula précipitamment alors qu’il pouvait parfaitement sentir le regard furieux que posait sur lui le Verseau, bien conscient cette fois. Ce dernier se réajustait avec des gestes secs, sans que son masque ne se détourne une seule fois de lui, comme s’il le surveillait attentivement. Une fois cela accompli, il se ramassa contre le mur, jambes ramenées contre sa poitrine et bras les enserrant dans un geste instinctif. Même s’il avait tenté de les cacher, le Grand-Maître avait parfaitement deviné les tremblements qui agitaient ses mains, si ce n’était son corps entier. Et cela, il pouvait parfaitement le comprendre… Lui-même se sentait franchement mal après ce qu’il venait de découvrir et d’expérimenter jusque dans son âme malgré lui…
Galilée poussa un profond soupir avant de se laisser tomber sur une chaise et de se masser la racine du nez. Comment débuter une conversation sérieuse après ce qu’il venait de se produire ? Laïloken devait se méfier de lui comme de la peste, ce en quoi il ne pouvait le blâmer. Quelle idée avait-il eu aussi de céder à sa pulsion ? Pourquoi donc avait-il été incapable de se maîtriser ?
– Je suis désolé pour ce qu’il vient de se passer, Laïloken. Je ne pensais pas perdre le contrôle de cette manière alors que je voulais simplement m’assurer que tu n’étais pas blessé.
Seul un silence hostile lui répondit. Le Verseau n’avait pas bougé d’un millimètre, comme s’il tentait de se fondre dans le décor. Le Grand-Maître se redressa et reprit :
– Je vais être franc avec toi : tu m’attires énormément, Laïloken. Tu es très séduisant, même si tu te caches. J’aurais dû être capable de m’abstenir en sachant ce qui t’était arrivé, mais te voir ainsi… Ça a été plus fort que moi. Maintenant que j’ai compris à quel point tu as été meurtri, je te promets d’attendre que tu sois prêt.
Le Verseau se contentait de le fixer à travers son masque, choqué. Il n’aurait même pas besoin de faire d’effort, il suffisait de lui faire signe… Savoir que ce type voulait déjà le mettre dans son lit… Il se sentit très mal à cette simple idée et il retint son mouvement de recul. Ce n’était plus un simple jeu de séduction, là. Le problème était qu’il ne pouvait se permettre qu’il le touche, il ne le supporterait pas. Mais lui laissait-on seulement le choix ? Galilée lui avait-il laissé le choix ? Non… Pour lui, Laïloken deviendrait son amant tôt ou tard, cela ne faisait aucun doute… Il sentit ses yeux picoter de nouveau. Lamentable… Vraiment lamentable ! ! Par Athéna, mais dans quoi s’était-il embarqué ? Sans compter que tout ce qui se rapportait à son corps était devenu tabou pour lui… Il allait devoir trouver une solution rapidement… Qui serait donc capable de lui faire surmonter ce dégoût de lui-même ?
– Que s’est-il passé ? demanda brusquement Laïloken pour changer de sujet.
– J’allais te poser la même question, rétorqua le Grand-Maître, une fois revenu de sa surprise.
Le Verseau crispa ses poings sur son pantalon alors qu’il gardait un silence buté.
– Laïloken, lorsque la sécurité du camp est en danger, je veux avoir tous les éléments en main pour parer au cas où. Que peux-tu me dire sur ce qu’il vient de se produire ? A-t-on tenté de te contacter ?
L’ancien Chevalier resta un long moment inerte comme s’il n’avait pas compris les questions, puis lentement, il acquiesça d’un mouvement de tête à peine perceptible. Le Grand-Maître fronça les sourcils et approcha sa chaise tout en reprenant, son attention entièrement tournée vers les réponses du Verseau :
– On a voulu te contacter ? Tu sais qui ? Un Chevalier d’Or ?
Laïloken se raidit, guettant avec une vigilance accrue les mouvements du Grand-Maître, et il se mordit la lèvre inférieure au sang. Ce dernier, face au manque de réaction de son interlocuteur, reprit alors son interrogatoire :
– Laïloken, fais un effort, je t’en prie. Parle ! Qui a tenté d’entrer en contact avec toi ? D’où venait ce cosmos doré ?
Un silence assourdissant, toujours et encore. Galilée se retint de se lever et de secouer cette tête de mule jusqu’à ce que les réponses finissent par tomber sur le matelas toutes seules. Quelque chose devait retenir Laïloken ou alors il n’était pas encore en mesure de parler… Puis il avisa sa tension, le tic nerveux de ses mains et la position de ses jambes placées de sorte à pouvoir bondir à la moindre alerte. Le Verseau se sentait agressé, tout simplement, et il était sur la défensive, surtout après un tel réveil. Le Grand-Maître prit sur lui-même pour ne pas tenter de le consoler et recula de nouveau. Aussitôt, il vit l’ancien Chevalier se détendre légèrement, sans que sa vigilance n’en soit diminuée pour autant.
– Laïloken… soupira-t-il, tu ne me facilites vraiment pas la tâche. Sais-tu que les hommes de ce camp veulent ta tête actuellement ? Tu as tué dix des leurs durant ce phénomène, alors j’estime avoir le droit à une explication. Si tu ne me réponds pas, je te laisse entre leurs mains et dans l’état où tu es, tu ne feras pas long feu.
Le Verseau baissa la tête et joua fébrilement avec une mèche rouge, la triturant dans tous les sens pendant quelques instants, puis il murmura :
– Mon armure… C’était mon armure…
Le Grand-Maître se leva, non pas surpris puisque cela confirmait son hypothèse, mais il demanda pourtant :
– Pourquoi est-elle entrée en conflit avec ton cosmos ?
Laïloken se passa une main dans les cheveux et soupira d’un air las :
– Parce que ma cosmo-énergie a beaucoup évolué en six mois…
Galilée hocha la tête d’un air entendu :
– Et elle a du mal à te reconnaître… C’est logique. Et si elle t’a contacté maintenant, c’est qu’elle a dû être réattribuée, n’est-ce pas ? Donc, officiellement, tu n’as plus d’armure puisqu’elle t’a également renié.
Le Verseau ne chercha pas à le contredire : le Grand-Maître s’était fait son propre scénario, c’était très bien, qu’il s’y tienne ! Ses épaules s’affaissèrent et il détourna enfin son visage.
– Je… Je ne pensais pas que ça serait aussi dur… Ça fait mal…
– Dis-moi, c’est très important : penses-tu que quelqu’un ait pu te localiser à travers le lien qui s’est créé entre ton armure et toi ?
Laïloken secoua la tête aussitôt, ce qui soulagea en partie Galilée. Un Chevalier d’Or sentait ce genre de chose, il pouvait faire confiance au Verseau, si ce dernier était sincère. Il soupira profondément avant de lancer d’une traite :
– Bon, se séparer d’une armure est toujours très pénible, tu vas te reposer quelques jours, le temps de récupérer ton énergie. Ensuite, tu partiras en reconnaissance avec Aden. Il se passe des choses vers l’ouest, j’aimerais que tu ailles juger par toi-même de la situation et que tu fasses le ménage, si nécessaire. En attendant, j’espère que ce genre d’événement ne se reproduira pas où je ne réponds plus de ta vie, compris ?
Le Verseau releva son visage masqué, fixant de nouveau le Grand-Maître, puis hocha lentement la tête. Il avait parfaitement saisi : la carotte et le bâton. Qu’il accomplisse sa mission et tout irait bien. Qu’il échoue ou se fasse encore remarquer et il était mort. Finalement, cette infiltration était plus délicate qu’il ne le pensait, surtout qu’on lui mettait des bâtons dans les roues et que l’ennemi se révélait vraiment retors et dangereux.
Le Grand-Maître laissa Laïloken qui s’était plongé dans ses réflexions et retourna à ses propres devoirs. La panique du Verseau avait été bien réelle mais il était tout de même sidéré par sa rapidité à récupérer, tout Gold qu’il soit. Il lui avait laissé le marché en main, il savait qu’il avait été dur, mais il n’avait guère le choix. Après tout, il ne savait toujours pas s’il pouvait lui faire confiance. C’était l’occasion rêvée de tester sa loyauté. Il se doutait qu’une telle explosion de cosmos allait attirer des guerriers, autant que la confrontation, qu’il pensait inévitable, se fasse à l’extérieur du camp…
– Frontière d’Asgard, au même moment –
Juché sur sa monture, le Guerrier divin d’Alpha s’était décidé à quitter son domaine. Cela faisait trop longtemps qu’il n’avait pas eu de nouvelles de Laïloken et il n’y tenait plus. C’était devenu une obsession. Sans parler du fait que ce dernier était censé lui faire un rapport de manière régulière et que c’était loin d’être le cas. Avait-il prévu un tel silence dans son plan ? C’était insupportable pour celui qui attendait…
Il venait d’atteindre la frontière du Royaume d’Asgard et la plaine enneigée s’ouvrait à perte de vue devant son regard, lui laissant le choix sur la direction à prendre. Où aller ? Si seulement il le savait… La moindre piste serait la bienvenue… Il repensa un bref instant à cette saleté de machine qui ne lui avait rien appris. Non, décidément, rien ne remplacerait les anciennes traditions. Il se concentra un moment, tentant de percevoir les ondes du cosmos glacial si caractéristique du Verseau, en vain.
Puisqu’il fallait bien faire un choix, même s’il était arbitraire, Siegfried décida d’aller droit devant lui. Il finirait bien par découvrir quelque chose. Il ne pouvait s’empêcher de juger la méthode de Laïloken bien personnelle et trop rude. Il aurait dû se montrer plus combatif et l’empêcher de faire cavalier seul. Il trouvait que le Verseau avait fait preuve de bien trop de sang-froid en la circonstance et il était certain que sous ce masque se cachait un regard capable de tuer. Laïloken le fascinait par sa force et sa faiblesse, par cette glace qui le couvrait mais qui pouvait se briser comme du cristal.
Il maugréa quelques mots indistincts et se replongea de plus belle dans ses souvenirs. Il n’avait que cela pour le moment. Des souvenirs du visage racé qui avait trop vite disparu derrière ce masque argenté si impersonnel ; des souvenirs des yeux saphir qu’il devinait brillant d’intelligence, puisqu’il ne les avait vus que vides ou fiévreux, voilés de même par le regard stérile et métallique du masque ; des souvenirs des nuances profondes et multiples que prenaient ses longues mèches marine selon la lumière qui s’étaient aussi envolées dès que cette horrible teinture écarlate avait fait son affreux méfait… Sans parler de ce corps qui avait repris des formes plus qu’agréables dès que Laïloken était sorti de sa catatonie grâce à l’entraînement draconien, qu’il avait recommencé sans tarder, et à un retour à la normale du côté alimentaire. Et il y avait cet esprit vif et sagace qui l’avait captivé sans le vouloir et qui lui avait ouvert d’autres horizons sans le faire exprès…
Laïloken lui manquait… Oui, c’était bien de cela qu’il s’agissait : il voulait retrouver le Verseau pour sentir de nouveau sa présence.
Le Guerrier divin se redressa si brutalement sur sa selle que sa monture s’arrêta net, surprise de recevoir un tel ordre de son maître sans réelle justification. Siegfried avait blêmi alors que son cœur battait violemment dans sa poitrine. Ainsi donc c’était pour cela qu’il était devenu si irritable depuis le départ du Saint d’Or ? Lui, qui avait courtisé si discrètement Hilda depuis toujours, se retrouvait face à un coup de foudre pour quelqu’un dont il ne connaissait presque rien ! ! C’était inconcevable ! En plus, ce n’était pas une demoiselle, non, mais un homme ! ! Et pas n’importe qui… L’espion en titre du Sanctuaire d’Athéna, un guerrier appartenant à l’élite du Domaine grec, le Verseau d’Or réputé pour son cœur de glace, un Chevalier utilisant des techniques mortelles qui créaient un froid plus intense que le blizzard d’Asgard… Pas moins… Il était devenu fou ou quoi ? ?
Siegfried en était encore à se morfondre sur sa découverte lorsque son esprit, qui passait en revue tout ce qu’il avait vécu avec Laïloken, et qui corroborait tout ce qu’il savait sur son côté redoutable, lui rappela que tout puissant et dangereux que pouvait être le Verseau, ce dernier serait mort s’il n’était intervenu à temps. C’était là qu’il l’avait vu fragile, dépendant uniquement de lui pour sa survie, brisé… L’Asgardien ferma les yeux un instant, avant de finir par admettre que Laïloken était en train de se battre avec ses propres armes pour surmonter ce qui l’avait anéanti. Mais, dans ce combat, le Verseau ne devait pas oublier qu’il n’était plus seul : lui, il était là, prêt à l’épauler sans un mot, comme il l’avait fait durant sa convalescence.
Il talonna son cheval pour repartir. Il devait le retrouver, savoir si son infiltration se déroulait correctement, le sortir de là s’il était en danger… Siegfried commençait à comprendre qu’il éprouvait aussi un formidable instinct de protection envers cet homme qui lui faisait penser à un animal blessé. Il venait de reconnaître ce qu’il ressentait pour lui, et même si ce n’était pas très facile à accepter, il devait pourtant déjà réfléchir à sa façon de réagir face au Verseau. Comment faire comprendre à un glaçon qu’il lui plaisait ? Surtout à un glaçon meurtri au plus profond de sa chair ?
Alors que sa monture venait de passer à un petit galop tranquille, le Guerrier divin était en train de se lancer dans toute une liste de consignes, la principale étant, bien évidemment, de ne pas le toucher… Il savait que Laïloken avait énormément de mal avec les contacts physiques et le prendre directement dans ses bras serait une erreur monumentale. Mais d’un autre côté, il avait une folle envie de sentir sa peau sous ses mains, de caresser ses cheveux, de le câliner et de le rassurer…
Siegfried sursauta alors qu’il sentait ses joues le brûler, et non à cause du froid. De mieux en mieux ! A quoi il pensait là ? ? Il était bien en train de rêver qu’il tenait le Saint d’Or dans ses bras… Mais que lui avait donc fait Laïloken pour qu’il songe sans arrêt à lui ? C’était incroyable d’avoir une idée fixe à ce point et de réagir physiquement rien qu’en s’imaginant de le…
Rhaa ! ! ! Non ! ! Ce n’était pas le moment ! ! Il était à cheval, par Odin ! ! Si jamais une certaine partie de son anatomie se réveillait en ce moment, il allait souffrir atrocement et il ne pourrait pas…
Cette fois, Siegfried vira au cramoisi alors qu’il se maudissait copieusement, lui et ses idées étranges. Le Verseau l’avait envoûté, ce n’était pas possible autrement ! Tout son corps l’appelait, il sentait le désir enflammer ses sens alors que coulaient dans ses veines les flammes de l’enfer… Que c’était paradoxal ! ! Un être de glace capable d’éveiller un tel brasier chez quelqu’un d’autre sans même le vouloir ! Il devait avoir attrapé un virus ou un truc du genre, parce que vu les proportions que cela prenait, il ne voyait pas d’autres explications… Existait-il un vaccin contre l’embrasement des sens à l’évocation d’un certain Verseau ? Ou alors, l’autre lui avait fait avaler un philtre à son insu, l’empoisonnant pour de bon avec le venin de la passion…
Les yeux du Guerrier divin s’écarquillèrent et il s’efforça de ramener son imagination partie divaguer un peu trop du côté de Tristan et Yseult… Histoire que lui avait contée Laïloken au coin du feu lors d’une veillée bien sympathique… Hiiii ! ! ! Mais c’était pas possible… Tout le ramenait à Laïloken ! ! Il était devenu vraiment dépendant, lui, le Général d’Hilda de Polaris ! ! Il se trouvait franchement ridicule… Oui, il avait Laïloken dans la peau et sa passion pour ce dernier lui coulait dans les veines comme le plus doux des poisons…
Il devait ne plus penser à rien… ou plutôt essayer de retrouver la signature du cosmos de son obsession des glaces. Il se concentra, ne tournant son esprit que vers cette recherche. Il n’y avait aucune trace dans la neige et ce n’était guère étonnant avec le vent qui soufflait. Se fier à son instinct de chasseur, comme lorsqu’il était gamin, lorsqu’il traquait un gibier…
Le paysage était franchement monotone et identique pour le néophyte qui ne pouvait repérer les subtiles différences : la courbe d’une congère ici, un mur de glace plus accentué là, une neige plus ou moins souple selon le terrain et la température de l’endroit… Le temps fila et il avait remis sa monture au pas pour lui permettre de récupérer. Il allait devoir songer à se trouver un abri dans les prochaines heures pour passer la nuit.
Aidez… Moi…
Il s’immobilisa, entièrement aux aguets… Cela ressemblait à un murmure, mais il n’y avait rien dans ces lieux uniformes et, de toute façon, il aurait juré entendre Laïloken. Il sonda les alentours avec son cosmos pour en être certain mais, effectivement, il n’y avait personne d’autre que lui dans la zone… Puis, la voix chuchota encore, plus doucement, et il comprit que c’était de la télépathie.
S’il… Vous… Plaît… Ai…dez… Moi…
Une vague d’inquiétude lui serra les entrailles et il chercha à localiser la source de cet appel au secours mental… Laïloken était en danger et il faiblissait ! Et lui n’était pas là pour l’aider ! La rage et la frustration l’aveuglaient. Mais où était-il, bon sang ? ? Il hésita entre partir à pieds où il serait plus rapide ou rester en selle… Mais s’il devait ramener Laïloken, mieux valait garder la monture. Il talonna rudement son cheval qui se lança au triple galop, non sans marquer son mécontentement d’un hennissement aussi douloureux que fâché.
Un flash aveuglant lui vrilla le crâne durant quelques instants… Ce fut tout ce que Siegfried ressentit au moment où le cosmos de Laïloken explosait, loin, très loin de là… A plusieurs jours de cheval, même. Pourquoi l’avait-il ressenti aussi durement ? Le Guerrier divin songea qu’en cherchant à repérer la moindre onde glaciale provenant du Verseau, il avait fini par trouver tout le flux et il venait juste de se le recevoir en pleine figure. C’était douloureux… Mais il n’osait imaginer ce que cela signifiait pour Laïloken. Si ce dernier avait appelé au secours et avait fait exploser son cosmos de toute sa puissance, c’était qu’il devait livrer un combat à mort où il avait le dessous…
Tenaillé par l’urgence, Siegfried s’accrochait aux derniers filaments de cosmos qu’il sentait et qui s’évaporaient plus vite que la neige au soleil. Son cœur se serrait. Pourvu que… Il ferma un instant les yeux, se refusant à envisager le pire : Laïloken était un Saint d’Or, sa puissance était supérieure à celle qu’il avait en quittant le Sanctuaire et il était d’une nature prudente… Jamais il ne se laisserait tuer aussi facilement, c’était absurde. Et pourtant…
Mortellement inquiet, Siegfried ne ressentait plus le cosmos du Verseau qui semblait avoir totalement disparu…
– Sanctuaire d’Athéna, les arènes, une heure plus tard –
Debout dans les gradins, Mü attendait que Shion soit disponible pour aller lui parler seul à seul. Il se doutait que d’ici peu, il allait se retrouver avec une armure à examiner sous toutes les coutures, mais il voulait obtenir le maximum d’informations auparavant. Cette Epreuve ne s’était absolument pas déroulée normalement, et, s’il n’était pas rare de voir une armure refuser son prétendant, il était déjà beaucoup moins fréquent d’être le témoin d’une telle agressivité sans motif apparent. Il devait bien y avoir une raison cachée à tout ce cirque, encore fallait-il qu’on lui en donne la clé.
Il regarda les Bronzes qui entouraient un Cygne encore sonné – ou choqué ? – par ce qui venait de lui arriver. Le Russe semblait l’avoir plutôt mal pris. Son regard pâle ne cessait de revenir à la Pandora Box et au bout de quelques instants, il quitta brusquement les arènes, laissant en plan ses demis frères abasourdis. Andromède et le Dragon s’approchèrent prudemment de l’estrade en veillant à ne pas " provoquer " Aquarius, dans le vain espoir d’avoir une bonne nouvelle à annoncer au Cygne après cet échec cuisant. Mais au lieu de leur annoncer que l’Epreuve serait retentée plus tard, le Grand Pope leur demanda de remonter la Pandora Box à son palais avec une indifférence marquée.
Le Bélier vit donc Shun s’en approcher avec méfiance, puis enfiler doucement les courroies pour les glisser sur ses épaules et enfin la soulever, toujours lentement, prêt à tout lâcher au moindre signe suspect. Brave Andromède… Toujours prêt à se sacrifier… Le Dragon se tenait à moins de deux mètres, tendu et paré à toute attaque venant de la boîte d’or. Mais Aquarius resta inerte. Il n’y eut absolument aucune manifestation étrange et, rassurés, les deux Bronzes se mirent en marche, relâchant peu à peu leur attention.
Mü plissa les yeux et effleura de son cosmos la Pandora Box mais il ne sentit aucune aura, comme si l’urne n’était qu’une simple boîte en métal doré. Etrange… Il revint à lui et constata que la plupart de ses pairs s’étaient déjà égaillés pour reprendre le cours de leurs activités. Il vit qu’Aphrodite entraînait un Milo ronchon à sa suite vers le réfectoire, alors qu’Angelo et Aiolia, bien pâle, se dirigeaient ensemble vers le Zodiaque en discutant avec animation. Dans un coin, Aioros les considérait d’un œil mauvais tandis qu’à l’opposé, Shaka tentait d’amorcer une discussion avec Saga plongé dans une intense réflexion. Et Shion n’était toujours pas disponible…
Pendant ce temps, Shun et Shiryu avaient entamé leur remontée du Zodiaque. Les premières volées de marches se déroulèrent sans encombre et ils étaient en train de traverser paisiblement le temple du Bélier en devisant tranquillement lorsque Shun s’immobilisa brutalement, les sens en alerte. Surpris, le Dragon le regarda, cherchant à comprendre ce qui lui arrivait.
– Euh… Tu n’as pas l’impression que le temps se rafraîchit d’un seul coup ? demanda Andromède en frissonnant légèrement.
Le Dragon secoua la tête, mais Shun reprit :
– Shiryu, je t’assure qu’il fait froid, là…
– C’est peut-être un courant d’air. Remettons-nous en route.
– Tu as sans doute raison… J’aurais dû prévoir un pull.
Les deux jeunes gens reprirent leur marche mais Andromède s’arrêta de nouveau dix mètres plus loin :
– Shiryu, ce n’est pas normal ! Il fait de plus en plus froid !
Le Dragon se retourna et vit son cadet qui tremblait franchement, les bras hérissés par la chair de poule. Sans aucun doute possible, Shun avait froid. Mais lui ne sentait absolument rien. Il revint donc sur ses pas, se plaçant à ses côtés… Et là, il perçut nettement un souffle glacial qui entourait Andromède de ses entrelacs complexes mais invisibles. Ce dernier s’exclama entre deux claquements de dents :
– Hyoga ! ! Sors de ta cachette ! ! Ça n’est pas drôle ! ! Je sais que c’est toi ! !
– Shun… murmura le Chinois en fronçant les sourcils.
– Non, Shiryu, je suis sûr que Hyoga nous fait une mauvaise blague. Hyoga, arrête maintenant ! !
– Shun… Je ne crois pas que…
Le jeune Chevalier grelottait, désormais. Et à ce rythme-là, il n’allait guère le supporter longtemps. Le Dragon voyait nettement ses lèvres bleuir alors que son teint pâlissait à vue d’œil. Mais ce qui l’inquiétait vraiment, c’était ce qui se trouvait dans son dos. Andromède se frotta vigoureusement les bras et claqua les pieds sur le sol. Il s’aperçut que de minuscules flocons de givre tombaient en virevoltant autour de lui et il poussa un gémissement plaintif :
– Hyoga… ? ! Mais qu’est-ce que tu fais ?
Il releva la tête, les larmes au bord des yeux, et lança à Shiryu :
– Je ne comprends pas… Pourquoi… Que se passe-t-il ?
Le Dragon s’avança lentement, prudemment et répondit :
– Shun, reste calme, s’il te plaît. Je ne pense pas que Hyoga y soit pour quelque chose.
– Mais qui ?
Les yeux d’Andromède s’écarquillèrent et il s’exclama :
– Non… Ce n’est quand même pas… ? ? ! Si ? ?
Shiryu avait un peu de mal à suivre les pensées de son demi frère :
– Shun, de quoi tu parles ?
– Mais qui veux-tu que ce soit ? ? C’est Camus, bien sûr ! ! A travers son armure ! ! Il n’y a que lui ou Hyoga pour parvenir à faire ce genre de choses et si ce n’est pas Hyoga, c’est forcément Camus !
Shiryu parvint à garder son calme face au raisonnement tiré par les cheveux d’Andromède… même si avoir été témoin de ce qu’il s’était passé dans l’arène pouvait très bien amener à ce genre de conclusion. Mais le Dragon avait aussi vu l’armure du Sagittaire agir, selon les moments, de sa propre volonté ou de celle d’Aioros, alors que celle de la Balance avait toujours été guidée par Dokho, comme celle du Verseau avait jusque-là obéi à Camus. Mais là, il ne sentait tout simplement pas les ondes glaciales propres au Français… Ce dernier n’y était pour rien, pas plus qu’il ne pouvait être impliqué dans les événements de l’Epreuve d’armure. De sa propre déduction, la Cloth agissait d’elle-même, sans aide extérieure et c’était bien cela qui était dangereux.
– Calme-toi, Shun, ne t’énerve pas… Pose doucement l’urne à terre, s’il te plaît. Il faut que tu t’en éloignes le plus vite possible.
Andromède posa ses mains fines sur les sangles et poussa un cri de stupeur tout en les ôtant aussitôt. Et ce qui devait arriver, arriva. Des larmes cristallines se mirent à dévaler les joues délicates ayant gardé les rondeurs de l’enfance. Shiryu contint son soupir de lassitude. A chaque fois, c’était pareil… Devant la moindre contrariété, leur cadet se mettait à pleurer… Décourageant… Mais là, ce n’était guère le moment. S’il ne se ressaisissait pas rapidement, Andromède allait finir congelé… Ses larmes commençaient déjà à se solidifier sous l’aura glaciale qui l’entourait…
– Shiryu ! ! Fais quelque chose ! ! Je ne peux pas toucher aux sangles, c’est trop froid ! ! Camus veut me tuer, j’en suis sûr ! Il se venge ! ! ! hurla le plus jeune, hystérique.
Le Dragon allait finir par perdre son calme légendaire. Les cris ajoutés au froid de plus en plus pénétrant dégagé par la Cloth lui vrillaient les nerfs. Comment le Vieux Maître aurait-il réagi face à une situation pareille ? Déjà, tenter de rassurer Shun, ou lui faire récupérer sa raison… Chose plus facile à dire qu’à faire…
– Shun ! Arrête ! ! Camus n’a rien à voir là-dedans ! C’est la Cloth, et uniquement la Cloth qui agit ! !
– QUOI ? ? ! ! Tu me dis que l’armure m’en veut ? ? Mais qu’est-ce que je lui ai fait, moi ? ? ? Pourquoi faut-il qu’elle soit si agressive ? ? ?
Okay… Ça ne marchait pas de toute évidence. Andromède allait lui percer les tympans avec ses hurlements atteignant des degrés insoupçonnables dans les aigus… Et là, le Dragon pensa aux grands moyens, en espérant que l’autre psychopathe ne soit pas dans le coin… Il leva la main et appliqua un impressionnant aller-retour sur les joues gelées de Shun qui se tut aussitôt, trop abasourdi pour continuer sa crise. Il ne pleurait même plus ! Shiryu apprécia le retour du silence durant une seconde avant de passer à l’étape suivante : obliger l’armure à lâcher Shun… Bien corsé aussi, cela, parce que la Cloth ne semblait pas franchement apprécier qu’on vienne se mêler de ses affaires. Une fine couche de givre recouvrait progressivement les vêtements du jeune homme dont la peau bleuissait…
Au moment où le Dragon allait poser ses mains sur les sangles, il vit un garde qui venait d’entrer, incertain, dans le temple du Bélier et qui préférait maintenir une distance prudente. Ce dernier demanda, son regard passant sans cesse de Shun portant l’urne du Verseau à Shiryu :
– Mais… que se passe-t-il ici ? Vous avez un souci ?
Le Dragon arbora une mine crispée et rétorqua :
– Allez quérir Mü du Bélier immédiatement ! On a un problème avec l’armure d’or !
Le garde resta quelques secondes encore hésitant, évaluant la situation sans vraiment la comprendre, puis se mit enfin à détaler comme s’il avait tous les Spectres d’Hadès aux fesses.
Une fois qu’ils furent de nouveau seuls, Shiryu empoigna fermement les sangles afin de les faire glisser des épaules de Shun. Il eut l’impression d’avoir les mains coupées par le froid intense et il se retrouva pris au piège d’un tourbillon glacé où dansaient de minuscules cristaux de givre. Il tenta de se dégager, en vain. Une force impressionnante l’obligeait à rester près d’Andromède et il se sentait faiblir rapidement. Il comprenait la panique de Shun. S’ils restaient ainsi, ils allaient finir par mourir d’hypothermie. Son cadet tremblait violemment en claquant des dents et son propre corps avait bien du mal à résister à ce souffle polaire.
Il prit la seule décision qui lui sembla convenir face à cette situation d’urgence. Il leva la main et utilisa le tranchant d’Excalibur pour cisailler les sangles. L’urne tomba à terre dans un long tintement métallique, tandis que les deux Saints chutaient à l’opposé, libérés de l’emprise de la Cloth. Shun était presque inconscient. Shiryu le prit dans ses bras, commençant à le frotter vigoureusement pour activer sa circulation sanguine tout en regardant la Pandora Box, totalement inerte, à quelques mètres d’eux. Le froid avait cessé de se répandre dès qu’elle avait touché le sol. Seuls des reflets blancs parcouraient sa surface de temps à autres, rappelant ce qu’il venait de se produire à ses victimes.
Le Dragon fut tiré de sa contemplation passive par des bruits de pas rapides. Il découvrit le Saint d’Or du Bélier qui venait juste de faire irruption dans son temple, suivi quelques instants plus tard de Pégase, qui n’avait décidément rien de mieux à faire que de chercher des ennuis. Il n’essaya pas de se relever de suite, Shun s’était blotti contre lui à la recherche d’une chaleur providentielle. Seiya, comme à son habitude, s’avança franchement vers les deux Bronzes et lorsqu’il voulut dépasser Mü, celui-ci lui barra le passage en tendant le bras d’un geste vif. Les yeux du Bélier étaient posés sur l’urne et il finit par demander :
– Que s’est-il passé ?
– L’armure du Verseau a attaqué Shun. Elle dégageait un froid intense et elle s’en est pris également à moi lorsque j’ai voulu l’aider à se libérer de son emprise. J’ai dû trancher les sangles pour éviter que Shun ne finisse par mourir d’hypothermie, répondit posément Shiryu.
Le Bélier plissa les yeux alors que toute son attention se focalisait sur la Pandora Box. Il s’approcha lentement et lorsqu’il la toucha, rien ne se produisit. Il la redressa, la souleva et commença à avancer vers la sortie du temple. Aussitôt, un vent glacial se leva et Mü la relâcha immédiatement. Aquarius semblait vouloir faire de la résistance, mais elle allait bien devoir céder. Sa place était au palais, en attendant qu’un nouveau prétendant tente sa chance.
Il décida que la télékinésie serait la solution idéale. Sans contact, elle ne pouvait geler personne. Aussitôt pensé, aussitôt mis en application. L’urne s’éleva dans les airs et il la fit progresser vers la sortie. Seiya le suivait, légèrement à l’écart et il s’immobilisa d’un seul coup. L’urne venait de s’illuminer, s’entourant d’un halo doré d’où suintait sourdement la menace. La Pandora Box s’ouvrit, laissant Aquarius apparaître, toute habillée de son aura étincelante, nimbée de flocons de givre qui dansaient autour d’elle dans un ballet féerique. Sa jarre tenue au-dessus du heaume luisait de l’énergie concentrée prête à être relâchée sur ceux qui la défiaient.
Personne n’eut le temps de réagir. Alors que Mü songeait que la Cloth allait attendre d’être poussée un peu plus dans ses retranchements, il n’en fut rien. Un blizzard digne des plaines enneigées de Sibérie surgit sans prévenir de la jarre et balaya presque tout sur son passage. Presque, car protégé par sa propre armure, Mü parvint à rester debout et à faire front en s’abritant le visage. Il était bien trop tard pour songer au Crystal Wall, sans compter que l’attaque renvoyée toucherait Aquarius, certes, mais surtout Shun et Shiryu… Du coup, ce fut Seiya qui se retrouva propulsé directement dans une colonne où il s’encastra lamentablement, comme un spaghetti balancé par un enfant contre un mur, histoire de voir si ça colle… Et là, le spaghetti était conservé par une bonne couche de givre en prime…
Le Bélier était interloqué. Balayer un Chevalier sans armure était déjà difficile pour une Cloth, mais qu’en plus celle-ci se paie le luxe d’immobiliser ledit Chevalier, là, ce n’était pas normal. De plus, il lui semblait évident que l’armure du Verseau ne voulait pas aller plus loin dans le Zodiaque. Elle avait attaqué à chaque fois qu’on avait essayé de la faire avancer. Pourquoi ? Quel mystère se cachait derrière ce comportement inhabituel ? Mü se reprit. La première urgence était de cesser de la contraindre afin que les jeunes puissent sortir du temple sans plus de dommages. Ensuite, il allait devoir faire preuve de délicatesse afin de la ramener à son atelier…
Il posa doucement l’urne à terre et relâcha sa pression mentale sur l’armure. Aussitôt, cette dernière se posa au sol, continuant tout de même à scintiller de son aura, alors que les reflets blancs parcouraient sa surface une nouvelle fois. Le masque d’or paraissait fixer le Bélier et ce dernier se sentait mal à l’aise. Il était bien conscient qu’à la moindre fausse manipulation, l’armure attaquerait derechef. Il prit la parole, surveillant la Cloth, comme on surveille le lait sur le feu :
– Shun, Shiryu, levez-vous et sortez du temple en passant au plus large possible. Emmenez Seiya avec vous.
Les Bronzes lui obéirent sans chercher à contester. Après tout, Mü était le spécialiste des armures. Il devait avoir une vague idée de ce qu’il se passait en ce moment. Le Bélier se retrouva donc seul face à une Cloth récalcitrante qui semblait s’amuser à tout geler sur son passage. Pourquoi ce genre de choses était toujours pour sa pomme ? Qu’avait-il donc fait pour mériter ça ? Il fallait croire qu’il avait un mauvais karma. Toujours sur ses gardes, il se mit à parler doucement, espérant qu’Aquarius serait à même de comprendre son message :
– Bon, écoute… Je ne chercherai pas à te remonter… Je vais juste te mettre dans mon atelier et vérifier que tout va bien… Est-ce que ça te convient ?
Face au manque de réaction de l’armure qui persistait à s’entourer de son aura, Mü poussa un soupir avant de reprendre, même s’il se sentait franchement ridicule :
– Je te jure que je ne ferai rien contre ton avis, parole de Chevalier. Tu resteras dans mon atelier le temps qu’il faudra. Je prendrai soin de toi et je vais tâcher de comprendre ce qu’il se passe. Je sais que tu n’agis pas sans raisons et je voudrai les connaître. C’est un marché honnête que je te propose. Es-tu d’accord pour aller dans l’atelier ?
La lueur dorée qui entourait l’armure se désagrégea lentement et Mü en conclut qu’elle avait accepté le contrat. D’ailleurs elle retourna dans sa Pandora Box. Cependant, les étranges reflets demeuraient bien présents, traduisant la méfiance de la Cloth. Pour Mü, c’était inouï : voir une telle volonté sur une protection de la chevalerie était insensée. Il en était à imaginer ce qu’avait enduré Camus pour acquérir le droit de la porter… Il avait dû être très persuasif, ce n’était guère possible autrement… A moins que ce comportement ne soit totalement récent, ou même inédit…
Le Bélier approcha lentement de l’urne, comme s’il tentait d’amadouer un animal sauvage sur la défensive, capable à tout moment de lui sauter à la gorge. Il continuait de parler, débitant tout et n’importe quoi sur un ton doux et apaisant. Il la souleva par ce qui restait de ses sangles et remonta jusqu’à son atelier où il la déposa sur l’établi avec un infini soulagement, sans rencontrer de problème. Aquarius restait sage. Seuls les éclairs blancs trahissaient l’éveil de l’armure. Il soupira, flatta le métal doré d’une main cajoleuse et remonta dans les parties privatives afin de réfléchir aux problèmes qu’il allait devoir résoudre sous peu, et sur la façon de s’y prendre…
Alors qu’il se préparait un thé, il en était venu à songer qu’il devait déterminer si l’armure obéissait à une volonté autre que la sienne, même s’il n’avait rien détecté au premier abord. Il allait devoir explorer sa patiente dans son intégralité… Autant dire qu’il n’était pas sorti de l’auberge… surtout si ladite patiente se mettait à jouer au congélateur sans thermostat à tout va… Ensuite, il allait devoir comprendre pourquoi Aquarius refusait de remonter le Zodiaque. Il devait bien y avoir une raison en dehors d’une subite envie de lui pourrir la vie… Et enfin, il y avait ce cosmos blanc, sorti de nulle part, qui avait rongé le cosmos doré de l’armure… Il allait devoir découvrir d’où il venait, pourquoi en ce jour, et quelles en seraient les conséquences sur la Cloth… Programme chargé pour les semaines à venir, il n’y avait pas de doute…
Tandis qu’il versait l’eau frémissante dans une tasse, il sentit la présence de l’un de ses pairs qui venait d’entrer dans son temple. Il suivit la faible cosmo-énergie sans se manifester. Au lieu de continuer son chemin, son visiteur entra dans son atelier où il s’arrêta. Le visage sombre, Mü prépara une seconde tasse et se hâta de le rejoindre de peur qu’un nouvel esclandre en dessous du zéro degré celsius ne vienne détruire son établi… et accessoirement, ne refroidisse pour de bon l’intrus qui ne tiendrait jamais face à un tel choc thermique.
Il le découvrit de dos, une main posée sur l’urne et chuchotant à voix basse, comme s’il parlait directement à la Cloth. Mü l’observa un moment, surveillant toujours l’armure qui ne bronchait pas, et il remarqua combien le Chevalier était maigre, même s’il se cachait sous une chemise ample et un pantalon large. Son cœur se serra. Son pair ne s’occupait vraiment plus de lui et se laissait aller. Il fallait que quelqu’un le reprenne en main avant qu’il ne soit trop tard. Il s’approcha doucement et l’appela :
– Milo ?
Le Scorpion se redressa brutalement, comme pris en faute, et se retourna, blême :
– Mü ? ? Je ne t’ai pas senti arriver… Je ne vais pas te déranger plus longtemps…
Le Bélier eut un doux sourire et lui tendit l’une des tasses de thé en répondant :
– Tu ne me déranges pas. Viens plutôt t’asseoir et bois ce thé que je t’ai préparé. Tu avais visiblement des choses à confier à cette Cloth, je n’ai pas voulu être indiscret, excuse-moi.
Milo le regarda, perplexe, puis lui obéit et posa ses mains sur la tasse chaude en baissant la tête. Il garda un silence embarrassé, n’osant pas affronter le regard de son hôte. Mü but une gorgée de thé et reprit calmement :
– Visiblement, l’armure accepte ta présence… Tu as de la chance. Ce n’est pas le cas de tous…
Une grimace déforma les traits du Grec qui murmura :
– Elle ne le devrait pas… C’est moi qui ai tué Camus, après tout…
Le Bélier jeta un regard triste à la Cloth avant de revenir à Milo :
– Tu as agi selon ce qui te semblait le mieux à ce moment-là.
Une larme coula sur la joue du Scorpion qui baissa encore plus la tête alors que ses épaules se voûtaient davantage :
– Mais… je ne l’ai pas tué en respectant son honneur… Il a énormément souffert, Mü… Je l’ai fait souffrir, je l’ai torturé… Je l’ai… Comment pourrais-je un jour me pardonner d’avoir fait cela à mon meilleur ami, à celui que j’aimais secrètement depuis si longtemps ? Je ne peux pas… Je… C’est trop dur…
La main du Bélier vint tendrement se poser sur sa joue et il la caressa doucement alors qu’il prit un ton apaisant :
– Milo, tu ne peux revenir sur le passé. Ce qui est fait est fait. Tu as agi sur le coup d’une pulsion car tel est ton signe. Qu’importe ce qu’il s’est passé à Athènes. L’essentiel est que tu te souviennes de lui tel qu’il était avant. Ne te laisse pas détruire à cause de quelques minutes de rage et de souffrance qui t’ont aveuglé au point de te faire perdre le contrôle sur tes instincts.
– Je ne mérite pas de vivre… laissa tomber d’une voix creuse son interlocuteur.
Le Bélier sentit un frisson lui parcourir le dos et il se redressa lentement :
– Qui t’a dit une chose pareille ?
– Personne…
Après un bref soupir, Mü rétorqua :
– C’est ce que toi, tu crois, Milo. Mais tu te trompes. Tu…
Milo se releva brutalement et hurla :
– Ne me dis pas que tu sais mieux que moi ce qu’il s’est passé, Mü ! ! J’ai assassiné de mes propres mains mon meilleur ami ! ! J’ai plongé ces mains dans son sang ! ! Je l’ai torturé et laissé pour mort après l’avoir fait pleurer ! ! ! Oui, tu m’as bien entendu ! ! J’ai fait pleurer Camus à cause de ce que je lui faisais endurer ! ! Ça, ça ne s’oublie pas ! ! Oh non ! ! C’est marqué au fer rouge dans mon esprit ! ! Je revois toujours ses yeux vides d’où les larmes coulaient sans s’arrêter, son sang s’étendre sur le sol et teindre de rouge ses cheveux si beaux ! ! Je suis un monstre ! !
Le Bélier jeta un coup d’œil inquiet à Aquarius, craignant que celle-ci ne réagisse mal à l’aura instable au possible du Scorpion et à son éclat de voix. Mais l’armure restait sage, seul un reflet glacial courait de temps à autre sur la surface de la Pandora Box. Rassuré de ce côté-là, il se reconcentra sur son invité qui tremblait de tous ses membres, le regard perdu dans le vide, certainement reparti dans ses souvenirs douloureux. Il prit un ton ferme, cette fois :
– Milo, t’autoflageller ne te mènera à rien. Camus est mort, qu’importent les circonstances. Toi, tu es en vie et il faut que tu arrêtes ça immédiatement. Tu te détruis parce que tu te sens coupable. Mais est-ce que cela va faire revenir Camus ? Non ! Tu te complais dans ta souffrance par pur égoïsme ! Camus n’aurait jamais voulu te voir comme ça ! Pense un peu à lui ! Crois-tu qu’il serait heureux de te voir larmoyer et te morfondre sans cesse ?
– Mais j’ai si mal ! ! Il me manque et j’ai tellement honte ! !
Le Bélier se leva et vint se planter devant lui :
– Tu as mal parce que tu es humain, Milo, simplement humain… Ne te laisse pas ronger par des regrets inutiles. Il faut que tu surmontes cette souffrance pour aller mieux.
– Mais je ne veux pas aller mieux… balbutia le Scorpion, perdu.
Le Saint d’Or posa ses doigts sous le menton de son homologue et le força à le regarder dans les yeux. Son regard doux contrasta alors violemment avec les mots durs qu’il prononça :
– Et pourtant, tu le dois, parce que là est ton devoir. Tu es un Chevalier d’Or, Milo, que tu le veuilles ou non, et un Chevalier d’Or ne s’apitoie pas sur ses actes passés, aussi cruels qu’ils aient pu être. Tu te dois d’être au meilleur de ta forme pour servir Athéna. T’es-tu vu dans une glace récemment ? A quoi sert un Saint d’Or qu’une fillette pourrait mettre au tapis, dis-moi ? Voudrais-tu être responsable d’autres morts ? Parce qu’en persistant, tu mettras la vie de chacun d’entre nous en danger si le Sanctuaire se fait attaquer. Prends tes responsabilités, Scorpion d’Or. Athéna a besoin de toi, comme de nous tous, pour protéger son Domaine.
Milo déglutit péniblement, les yeux encore rouges de ses larmes récentes et il répondit, incertain :
– Je ne suis plus digne d’être un Saint d’Or, Mü.
Le Bélier secoua la tête lentement :
– Pourtant tu as endossé ton armure aujourd’hui. La Cloth du Scorpion ne t’a pas renié. Tu es donc le seul apte à la porter. Regarde ce qu’il s’est produit avec Hyoga ce matin : l’armure du Verseau l’a tout bonnement rejeté parce qu’il n’est pas digne de la revêtir selon elle. Alors tant que ton armure te couvrira sans rechigner, tu resteras le Saint d’Or du Scorpion et tu auras tes obligations de Chevalier à accomplir.
– Dis comme ça, on a l’impression qu’il s’agit d’une charge… fit Milo en grimaçant.
– Bien plus qu’une charge, c’est un honneur qu’on ne peut rejeter…
Milo se laissa tomber sur la chaise en marmonnant :
– Mü, je crois qu’on n’a pas la même façon de voir les choses…
– Que veux-tu dire ? demanda ce dernier, perplexe.
Le Scorpion but une gorgée du breuvage bien refroidi et répondit, défaitiste :
– Laisse tomber… J’ai compris ton message, mais j’en ai encore trop sur le cœur pour l’instant. Je crois que j’ai encore besoin de temps, mais je tâcherai de ne pas être un poids pour vous… Je suis un Gold après tout, et on ne demande pas à un Gold d’avoir une âme…
Le Bélier se sentit très mal à l’aise face à cette réplique pessimiste. La vision de Milo sur la chevalerie était par trop dérangeante. Etait-ce parce qu’il était l’un des assassins qu’il considérait si mal leur ordre ? Il ne savait plus que penser. Il se tourna vers l’armure et s’approcha d’elle lentement. Mü ne voulait réfléchir qu’à un seul problème à la fois, et celui posé par la Cloth était de loin le moins dangereux pour son état mental. Il ouvrit l’urne et en sortit l’armure intacte, toujours étincelante et surtout inerte, pour le moment… Il venait de l’installer sur son établi lorsque la voix du Scorpion s’éleva de nouveau, le faisant sursauter :
– Tu sais ce qu’elle a, cette armure ?
Le Bélier secoua lentement la tête :
– A première vue, rien… Mais je ne l’ai pas encore examinée dans le détail…
Milo reposa sa tasse et s’approcha de la Cloth. Il tendit la main et la caressa presque amoureusement. Il eut un sourire triste et constata alors que ses yeux parcouraient les courbes douces de l’armure :
– J’ai toujours trouvé l’armure du Verseau magnifique… Elle est harmonieuse, sans angle vraiment agressif et il la portait avec une élégance incomparable… Il était vraiment impressionnant lorsqu’il la revêtait…
– Elle symbolise parfaitement le style des Chevaliers de Glace : une douceur apparente et une classe certaine mais néanmoins mortelles.
– Tu crois que Camus lui a laissé un ordre ?
Mü s’était penché un peu plus sur Aquarius, fronçant les yeux, ses mains concentrant son cosmos posées sur elle. Il ne répondit pas de suite, trop occupé à explorer les méandres de son histoire mouvementée qui avait imprégné chaque parcelle du métal précieux. Il finit par se redresser, après avoir tourné autour de la protection durant une dizaine de minutes, et il grogna, montrant indirectement son mécontentement :
– Hum… Aucune trace d’un ordre quelconque… Ou alors, il est vraiment bien camouflé… Elle ne me facilite pas la tâche, en plus ! Aquarius, il faudrait que tu me laisses t’examiner !
Un aveuglant éclair blanc lui répondit aussi sec. Le Bélier recula en marmonnant :
– D’accord, c’est bon… Je n’irai plus chercher aussi profondément ! Laisse-moi au moins voir si tu as un souci…
En tout cas, pour l’instant, parce que si tu crois que je vais me laisser faire et abandonner aussi facilement, c’est que tu ne me connais pas ! songea-t-il, agacé. Alors qu’il se concentrait de nouveau, Milo qui l’avait observé sans dire un mot, demanda brusquement, brisant net l’élan de son compagnon d’armes reparti à l’assaut de la récalcitrante :
– Tu l’as senti, toi aussi ?
Mü retint son soupir et, contrarié, il reporta son attention sur le Scorpion, qui recula devant ce regard inquisiteur.
– Senti quoi ? Tu peux être plus précis ?
– Ben, euh… L’armure, dans l’arène… Elle appelait quelqu’un, il me semble… Non ?
A l’expression déconcertée du Bélier, Milo comprit que ce dernier n’avait rien ressenti de cela et il s’en trouva plutôt gêné. Il chercha aussitôt à se démentir, de crainte d’avoir dit une bêtise plus grosse que lui.
– Euh… J’en suis pas sûr, hein ! C’était juste une vague impression… J’ai dû me tromper… Après tout, je suis plutôt à la masse, là…
Mü continuait de l’observer, avec un sérieux tout à fait inquiétant. Il demanda juste :
– Milo… Tu as bien dit que l’armure avait lancé un appel ? Est-ce que tu as reconnu le cosmos qu’elle cherchait à joindre ?
– Ben, tu te souviens du cosmos blanc qui était en train de geler l’armure ? C’est celui qui a répondu… Il… Il y avait comme des similitudes avec l’aura de Camus… Quelques-unes, mais pas plus… Et je n’en suis pas sûr, je te le répète…
– Le cosmos blanc ? répéta le Bélier pensivement. Tu dis que l’armure aurait volontairement cherché le contact avec un étranger ? ? Mais c’est impossible ! A moins que…
Il se retourna vivement, fouettant en passant le visage du Scorpion de ses longs cheveux mauves et il se repencha fébrilement sur Aquarius. Il approfondit ses recherches et, finalement, il poussa une exclamation excitée :
– Par Athéna ! ! Je l’ai ! ! Il y a des résidus du cosmos de ce matin ! ! Et c’est de là que vient la puissance d’attaque de l’armure ! ! Tu avais raison, Milo ! ! Il y a bien quelques similitudes avec le cosmos de Camus… et de Hyoga ! !
– Et qu’est-ce que ça signifie, d’après toi ?
Mü revint vers la table et s’assit sur une chaise, le front plissé et perdu dans une intense réflexion :
– Je ne sais pas vraiment, Milo… A ce stade, je ne peux qu’émettre des hypothèses… Ce cosmos ne peut être que celui de quelqu’un qui maîtrise les arcanes du froid… Et quelqu’un de puissant, encore… Mais si Aquarius a cherché à le contacter, lui, c’est peut-être parce qu’il est mieux placé que Hyoga pour prendre la succession de Camus… Mais qui ? ? Et cette aura est bien trop puissante… Jusque-là, je pensais que Camus était à la tête de la hiérarchie des Chevaliers de Glace… Je n’y comprends plus rien !
– Euh, je pense que tu ne devrais pas aller aussi loin… Parce que ça fait beaucoup de peut-être, à mon avis…
Mü le regarda prendre place sur la chaise et hocha la tête :
– Mais admets que les coïncidences sont nombreuses et je ne vois rien d’autre pour expliquer la brutale vindicte de l’armure du Verseau…
– Mü ? Tu es là ? fit soudainement une autre voix venant de la porte de l’atelier.
Les deux Chevaliers d’Or se tournèrent pour voir arriver Hyoga qui hésitait à entrer.
– Oh, Milo ! Je suis désolé… Je ne pensais pas déranger… Je voulais juste savoir ce qu’il en était pour l’armure… Je ne sais pas vraiment ce qu’il s’est produit, dans l’arène…
Le Bélier se passa une main lasse dans les cheveux et soupira longuement avant de répondre :
– Je n’ai fait qu’un examen sommaire, pour le moment… Je n’ai rien trouvé de vraiment probant, mis à part des résidus de l’aura blanche de ce matin…
– Des résidus ? demanda le Cygne en entrant dans la pièce. Est-ce qu’il y avait…
– … un ordre de ton maître ? coupa Mü. Non, rien de tel.
Hyoga avança vers l’armure, la regardant avec peine et bredouilla :
– Alors… Pourquoi ? Pourquoi n’a-t-elle pas voulu…
Alors qu’il tournait la tête vers les deux Golds, Mü se releva précipitamment au moment même où Aquarius embrasait son cosmos hargneux. Le Bélier hurla :
– Hyoga ! ! Ecarte…
Il n’eut pas le temps de finir sa phrase. Une vague de froid extrême jaillit de la jarre maintenue au-dessus du heaume de l’armure et Hyoga ne put esquiver l’attaque. Il se retrouva pris dans un énorme bloc de glace en moins de deux secondes, alors que l’établi, le sol et les murs étaient couverts d’une épaisse couche de givre.
– Bon sang ! Elle nous aura tout fait, cette Cloth ! ! s’exclama Mü en regardant les dégâts.
Milo éternua violemment et il ne put s’empêcher d’éclater d’un rire jaune :
– Tu es impayable, Mü ! Tu t’inquiètes plus pour ton atelier que pour le Cygne ! !
– C’est pas un coup de froid qui va le tuer… grommela le Bélier. Par contre, qui va devoir tout remettre en état ici, hein ?
Il se rassit précautionneusement et ajouta avec consternation :
– Bon, va falloir trouver un moyen de l’évacuer, lui… On peut pas le laisser là, l’armure ne le supporte pas… Pfff… J’ai mal au crâne…
– C’est qu’elle n’en veut vraiment pas du Russe… Je sais pas ce qu’il lui a fait, mais elle est constante dans son refus ! Bon, ce n’est pas si gra…
– Mü ! ! Par Athéna ! ! Où te caches-tu ? ? gronda une nouvelle voix colérique.
Le Bélier couvrit son visage de ses mains alors que Milo, oubliant son état dépressif pour quelques instants, suivait les événements d’un air amusé.
– Mü du Bélier ! ! Sors de ta planque ! ! J’ai deux mots à te dire ! !
– Dans l’atelier, Ikki ! répondit l’Atlante, blasé.
Il y eut des bruits de pas décidés et les deux Chevaliers d’Or virent débouler le Phénix, furieux comme jamais. Ce dernier posa le pied sur le sol verglacé et il perdit aussitôt l’équilibre. Emporté par son élan, il dérapa avec une lourdeur peu commune avant de glisser sur les fesses jusqu’au mur opposé en poussant un cri de surprise. Mü, stoïque, avait simplement fermé les yeux, atterré par ce spectacle. Milo, quant à lui, était en train de pouffer de rire, même si cela n’était guère prudent s’il voulait garder la vie sauve…
– Qu’est-ce que c’est que ce foutoir, nom d’un chien ! ? ! hurla le Phénix en tentant de se redresser sans se rétamer une nouvelle fois.
– Ikki, calme-toi… fit le Bélier, avec fatigue.
Le Bronze explosa littéralement de rage.
– QUE JE ME CALME ? ? ? TU VEUX QUE JE ME CALME ! ! ! MAIS TU TE FOUS DE MOI ? ? ? EXPLIQUE-MOI CE QU’IL SE PASSE OU JE VAIS VRAIMENT M’ENERVER ! ! !
– Ikki, tu devrais respirer un bon coup… Te mettre dans un tel état pour… euh… une petite plaque de glace, c’est un peu disproportionné, non ? tenta Milo pour venir en aide à son pair qui en avait visiblement assez.
Ikki, qui se tenait enfin sur ses jambes, foudroya du regard le Scorpion. Sa réponse fut tout aussi hargneuse :
– Oh, toi, tu ne devrais pas la ramener ! ! Après tout, c’est l’armure de ton plus grand pote qui met le souk, là ! ! Tu peux pas lui dire de remonter le thermostat ? ? Ou alors, je m’en charge moi-même ? Si cette ordure était là en ce moment, je lui aurais refait le portrait ! ! Jamais on ne s’est fichu de moi ainsi ! !
– NE PARLE PAS DE CAMUS DE CETTE FAÇON, JE TE L’INTERDIS ! ! ! tonna Milo, hors de lui à son tour. RETIRE CE QUE TU VIENS DE DIRE IMMEDIATEMENT ! !
– Oh… ? ! Et tu vas faire quoi ? M’attaquer ? ? Laisse-moi rire ! ! Tu n’es plus qu’une épave ! ! Un alcoolique ! ! Un poids mort pour le Sanctuaire ! !
– Ça suffit, tous les deux ! ! s’écria Mü, à bout de nerfs. Non mais c’est pas bientôt fini ? Vous n’êtes que deux idiots ! Ikki, la fureur t’aveugle et tu t’en prends à n’importe qui. Il vaudrait peut-être mieux que tu expliques pourquoi tu es ici. Milo, tais-toi, je te prie. Tu sais aussi bien que moi que la colère est très mauvaise conseillère. Et je suis certain qu’Ikki ne pensait pas ce qu’il disait…
– Eh oh ! Si ! Je le pensais, justement ! Tu ne vas pas dire à ma place ce que doivent être mes opinions ! lança Ikki en le prenant pour cible.
– Non, tu ne le pensais pas, reprit posément le Bélier en le défiant du regard.
Les deux Saints s’affrontèrent dans un silence pesant et tendu, avant que le Phénix finisse par fléchir et reporter son attention sur Aquarius, dont l’aura brillait toujours aussi intensément. Il serra les poings et gronda :
– Bon, Aries, tu peux me dire ce qu’il lui arrive à cette foutue armure ?
Mu tiqua en s’entendant appeler par sa constellation aussi méchamment, mais ne répondit pas à ce qu’il ressentait comme une insulte. Il répondit d’un ton sec :
– Je ne sais pas.
– Comment ça, tu ne sais pas ? Mais tu es le spécialiste des armures, non ? Ne me dis pas que tu es un charlatan, en prime ? !
– Cela fait à peine deux heures qu’elle est dans mon atelier, je n’ai pas eu le loisir de l’examiner complètement. Et de toutes façons, il va falloir beaucoup plus de temps, le problème est plus complexe qu’il n’y paraît, rétorqua le Bélier dont le regard s’assombrissait.
Le Phénix laissa passer quelques secondes, le temps de digérer l’information. Il reprit d’une voix très basse :
– J’espère que tu vas trouver très vite ce qui cloche, Aries… Parce que visiblement, tu n’as pas franchement la situation en main. Elle est dangereuse, cette armure ! Elle a failli tuer Shun et regarde Hyoga ! Il est enfermé dans un bloc de glace ! Qu’attends-tu pour le délivrer et bloquer l’aura de cette maudite Cloth ? ?
Mü regarda sa tasse où le reste de son thé avait gelé et inspira profondément. Il avait une furieuse envie de leur déclencher une Stardust Revolution pour se débarrasser de ses visiteurs encombrants et avoir enfin la paix. Il devait rester calme, zen, stoïque… Prendre ça avec philosophie, même si là, il avait atteint ses limites. Il ressentait le besoin impérieux d’appeler Saga à l’aide pour expédier le râleur, le dépressif, le glaçon et le congélateur dans une autre dimension… Au lieu de cela, le Bélier fit un effort immense pour garder un masque impénétrable et plutôt avenant.
– Ikki, tu débarques ici comme une fleur en hurlant si fort que même tout Asgard a dû t’entendre… Tu n’as aucune idée de ce qu’il vient de se passer, mais tu juges de la situation comme si tu savais de quoi il retournait… Et en plus, ta délicatesse habituelle n’a fait que retarder notre intervention, sans compter que tu as augmenté l’agressivité de l’armure…
– Comment ça ? Tu vas bientôt me dire que c’est de ma faute, en plus ?
– Ikki, fais gaffe… L’armure… marmonna Milo, même s’il était toujours vexé et ruminait sa vengeance.
– Quoi, l’armure ? répliqua vivement le Phénix avant de regarder Aquarius.
Moins d’une seconde après, il faisait flamboyer son cosmos, dégelant le sol autour de lui alors qu’Aquarius avait intensifié le froid qu’elle émettait. Le Bélier se leva, prêt à intervenir à tout moment. Parce que dégrader son temple, ça allait bien cinq minutes, mais il ne fallait pas le prendre pour un imbécile non plus !
– Tu crois que la maçonnerie va apprécier un gel et dégel aussi rapides ? grinça-t-il entre ses dents à l’adresse du Scorpion qui se garda de répondre.
Le Phénix s’approcha du Cygne, faisant fondre le bloc qui le retenait prisonnier, tout en se mettant en garde. L’armure n’était que menaçante pour le moment, elle ne cherchait pas à l’attaquer. Dès que Hyoga fut libéré de sa gangue de glace, Mü se téléporta pour le saisir et l’emmener à l’écart avant qu’Aquarius ne fasse une nouvelle tentative. Milo s’était relevé, surveillant les deux adversaires, paré pour toute action dans la mesure de ses capacités.
Au moment même où le Cygne fut éloigné d’elle, l’aura dorée de la Cloth s’amoindrit nettement, pour finir par se désagréger totalement quelques minutes plus tard, après avoir visiblement évalué le danger que représentait le Phénix pour elle. Ikki en resta soufflé. Il ne comprenait pas, il savait juste que les manifestations violentes de l’armure semblaient avoir un rapport avec le Russe. Mais pourquoi avait-elle agressé Shun, alors ?
Mü, réfugié dans le couloir menant à l’atelier avec Hyoga, qui reprenait ses esprits, l’interpella :
– Tu devrais ramener le Saint du Cygne avec toi, Ikki… Et préviens les autres Bronzes que tant que l’armure du Verseau sera dans mon atelier, ils ne pourront y entrer. Visiblement, tout ce qui touche à Hyoga de près ou de loin l’insupporte et si elle a attaqué Shun, c’est tout simplement parce qu’elle ne voulait pas remonter le Zodiaque…
Ikki fronça les sourcils, ayant du mal à accepter le fait que son cher petit frère ne soit qu’un dommage collatéral. Surtout après avoir vu l’état dans lequel il se trouvait… On n’allait pas lui faire avaler n’importe quoi ! ! Il pensait sincèrement que l’armure était détraquée, ou que ce traître de Camus lui avait fait quelque chose qui se réveillait en ce jour. Et ce n’étaient ni les yeux larmoyants, ni la pathétique colère de l’alcoolique du huitième signe qui lui feraient changer d’avis.
Il avança prudemment vers l’armure en tendant la main, restant tout de même sur ses gardes. Milo, en le voyant faire, lui déconseilla fortement de toucher la Cloth. Mais qu’en avait-il à faire de l’avis du Scorpion, lui ? Il était le mieux placé pour savoir ce qu’il devait faire et il voulait vérifier si cette armure était aussi dangereuse qu’elle le paraissait. Il parvint à moins d’un mètre de l’établi et ses doigts entrèrent en contact avec le métal doré.
Aquarius s’illumina brièvement et Ikki poussa un hurlement en retirant sa main qu’il tint serrée contre sa poitrine. Il recula d’un bond, prêt à en découdre avec cette saleté, mais il jeta d’abord un coup d’œil à son membre endolori. Sa main arborait une couleur bleue inquiétante… Il serra les dents de rage et foudroya du regard l’armure. Il s’apprêta à porter un coup vengeur à cette boite en ferraille qui pensait faire sa loi lorsqu’il s’immobilisa de surprise, le poing levé. Une larme venait de glisser sur le masque d’or d’Aquarius…
Il rabaissa son poing et, sans un mot de plus, ni un regard pour Milo, il quitta la pièce pour rejoindre Mü qui avait remis plus ou moins d’aplomb Hyoga. Ikki attrapa le Cygne dont il fit passer le bras autour de son cou et lança un regard d’avertissement à Mü. Il ne voulait pas que quelqu’un apprenne qu’une armure avait eu raison de sa colère grâce à une stupide larme ! Larme qui lui avait fait penser aussitôt à celles que versait trop souvent son cadet. Rhaa ! ! Non ! ! Personne ne devait le savoir ! ! On se moquerait de lui, c’était certain et il ne le supporterait pas ! !
Le Bélier ne fit aucune remarque, c’était inutile. Le Phénix devait aussi aller se faire soigner, mais il avait bien vu son expression perturbée. Il se demandait vaguement ce qui venait de lui arriver avec la Cloth, mais Milo se ferait certainement un plaisir de lui raconter la déroute du si viril Ikki… Le Bélier perçut nettement la menace silencieuse de l’irascible mais ne se hasarda pas à répondre. Pour dire quoi ? Qu’il s’était fait avoir par une armure caractérielle ? Qu’on vienne encore lui dire que le Phénix était un dur à cuire après ça !
Hyoga releva la tête et força Ikki à rester là. Le Cygne frissonnait encore, mais il n’y avait rien de grave. En fait, il avait dit à Mü qu’il avait renoncé à faire appel à son cosmos lorsqu’il s’était retrouvé dans le bloc de glace. Il ne voulait pas provoquer la Cloth qui aurait très certainement réagi face à cet influx d’énergie et aurait lancé une attaque plus dangereuse. Il avait donc attendu patiemment que l’armure se calme ou qu’on l’éloigne pour se délivrer, tout en tentant d’en percevoir les ondes de l’aura et de l’analyser. Mais il n’était arrivé à rien. L’intervention d’Ikki n’avait fait qu’accélérer les choses, finalement…
– Mü ? fit Hyoga doucement. Je voudrais te parler de quelque chose…
Le Bélier hocha gravement la tête, oubliant quelques secondes que son atelier était en train de devenir une piscine protégée… Le Cygne se recueillit un instant et finalement déclara :
– Je crois qu’il y a eu quelque chose d’autre lors de l’Epreuve… Quelque chose que je viens de seulement comprendre…
Le Bélier l’encouragea du regard alors qu’Ikki tourna la tête vers lui, étonné. Du coin de l’œil, Mü vit Milo s’encadrer à la porte de l’atelier, alerté par le ton sérieux du Cygne.
– Je crois… Je crois que la Cloth a établi un lien avec un autre cosmos… Je crois que l’aura blanche vient de là…
Le Scorpion sursauta nettement alors qu’Ikki faillit lâcher son demi frère de surprise. Mais Hyoga observait Mü qui était demeuré impassible et il demanda :
– Tu n’as pas l’air étonné… Ça ne te paraît pas farfelu comme théorie ?
Le Bélier ferma un instant les yeux avant de répondre doucement :
– Nous venions juste de formuler cette théorie avant que tu n’arrives. Milo a senti aussi qu’il y avait eu une sorte d’appel formulé par l’armure et qu’un cosmos très puissant y avait répondu…
Hyoga hocha la tête et confirma :
– C’est ça ! C’est l’impression que j’ai eue mais que je ne parvenais pas à définir ! Et qui… ?
Milo intervint alors :
– On ne sait pas de qui il s’agit. Mais il y a des similitudes entre ce cosmos et celui de Camus, ainsi que le tien…
– … et celui d’Isaak, le Général du Kraken… ajouta Hyoga pensivement.
Ikki scruta Milo d’un air soupçonneux et interpella le Scorpion :
– Et comment tu sais ça, toi ?
Milo soutint son regard et rétorqua en serrant les dents :
– Lorsque tu es un assassin, tu apprends vite à reconnaître ce genre de choses si tu veux survivre…
Mü avala sa salive et coupa net les questions qu’il sentait poindre de la part du Phénix en relançant Hyoga :
– Isaak ? Quel est le rapport ?
– Il maîtrise le froid… Isaac, Camus et moi sommes des Chevaliers de Glace… Ce qui signifie que le cosmos blanc est celui de quelqu’un qui est un éventuel Chevalier de Glace…
Le Bélier et le Scorpion échangèrent un bref regard entendu. Cela, ils l’avaient déjà évoqué entre eux, mais s’apercevoir qu’un tiers faisait exactement le même raisonnement rendait leur théorie beaucoup plus vraisemblable… et effrayante, quelque part. Qui pouvait savoir qui était cet individu à l’aura si puissante ? Il allait peut-être représenter un danger pour le Sanctuaire… Comment connaître ses intentions ? Et qu’attendait-il pour se manifester et réclamer l’armure du Verseau ?
– Dès que je serai rétabli, j’irai le chercher. Qu’importe où il se cache, je le trouverai ! lança le Cygne avec un air si déterminé que les autres en restèrent pantois.
– Grèce, Sanctuaire d’Athéna, Palais du Grand Pope, le lendemain –
Avant même que les portes du palais du Grand Pope ne se soient ouvertes, Athéna savait déjà qui se trouvait derrière. Il fallait dire qu’avoir été enlevée et enfermée dans un pilier se remplissant d’eau pour y être noyée avait de quoi créer certains liens… Aussi, en déesse courageuse qu’elle était, elle s’était levée pour faire face à celui qui entrait en conquérant dans la salle du trône, la main droite serrant son sceptre, la gauche froissant machinalement le tissu de sa robe blanche.
La démarche plus majestueuse que jamais, le nouvel arrivant remonta toute la salle, daignant fouler le tapis rouge dans sa grande mansuétude. Il tenait son trident avec une certaine désinvolture, ses doigts étreignant à peine le métal doré qui étincelait sous les reflets lumineux. Son corps ne trahissait aucune tension, chacun de ses mouvements ressemblant aux gestes lents et dédaigneux des grands prédateurs sûrs de leurs forces, tout aussi alanguis et souples que ces derniers, mais ô combien trompeurs. Pourtant son regard, lui, était une véritable dague d’acier trempé à lui seul. Ses pupilles d’un bleu soutenu fixaient la déesse sans sourciller, dégageant une froideur et une volonté écrasante, et la jeune fille s’accrochait inconsciemment à Niké pour ne pas reculer devant ces prunelles qui l’épinglaient implacablement.
Elle parvint à ne pas avaler sa salive et à garder une prestance suffisante pour ne pas donner l’impression d’être dévorée toute crue par cette divinité qui avait poussé la cruauté jusqu’à s’habiller en civil, avec une élégance sobre et délicate. Elle, qui portait son éternelle robe immaculée de cérémonie, avait vraiment la sensation de faire pâle figure face au dieu vêtu d’un clair pantalon à pinces et d’une chemise de soie d’un jaune très pâle dont le col était largement ouvert, dévoilant une peau hâlée… Le contraste entre eux était énorme, elle le savait, et elle n’était pas à son avantage, c’était évident. Mais elle ne devait pas céder. A aucun prix…
Le dieu s’arrêta devant elle et ne lui fit pas l’honneur d’un salut respectueux. C’était trop lui demander. Il se tenait avec morgue, en une pose qui n’avait de décontractée que l’apparence, et la fixait toujours aussi durement. Sa montée de l’Escalier Sacré ne l’avait même pas éprouvé. Et comme s’il était pressé et chez lui, il prit l’initiative de la parole devant une Athéna effarée d’un tel sans gêne :
– Le délai d’une semaine que je t’avais accordé expire, ma chère nièce. Je ne signerai ton pacte de non-agression qu’à la condition exclusive que tu me livres Kanon, Général du Dragon des Mers. Qu’as-tu décidé ?
La jeune déesse inspira profondément pour ne pas se laisser impressionner par ce ton péremptoire, redressa les épaules et répondit le plus posément qu’il lui était possible :
– Kanon est aussi l’un de mes Chevaliers, Poséidon, et je n’ai pas pour habitude de livrer mes hommes à qui que ce soit, quel que soit leur passé.
Le regard du dieu marin se mit à étinceler alors qu’il était visible que cette réplique l’agaçait prodigieusement. Il fronça les sourcils et son ton devint plus glacial, s’il en est :
– Dois-je comprendre que tu refuses d’accéder à ma requête simplement parce que ce traître est le fac-similé de ton Saint d’Or des Gémeaux ? Tu es trop sentimentale, ma pauvre nièce !
– Kanon a été lavé de ses fautes, je lui ai tout pardonné, rétorqua Athéna d’une voix plus posée. Il est l’un de mes Saints et occupe la même fonction que son jumeau. Je ne peux m’en séparer.
Poséidon secoua la tête, un air sardonique clairement affiché sur son visage :
– C’est très bien pour toi, tu es une brave fille. En ce qui me concerne, Kanon me doit réparations. Il doit aussi être jugé pour sa traîtrise et sa responsabilité dans la destruction de mon Domaine. A cause de lui, nombreux sont mes Marinas à avoir perdu la vie. Je ne puis laisser ses crimes impunis. Alors, cesse de tergiverser et remets-moi ce vaurien.
– Non.
Le ton sans appel d’Athéna déplut franchement à son interlocuteur qui ne l’entendait pas de cette oreille. Il voulait Kanon et il l’aurait !
– Comment ça : non ? A tes yeux, la vie de ce bon à rien a plus de valeur que ce traité auquel tu tiens tant ?
– Tu as tout compris, mon oncle. Et Kanon n’est pas un bon à rien, je te prie. Il a largement fait ses preuves.
– Que tu es naïve, Pallas ! Combien de temps crois-tu qu’il restera tranquille ? A la première occasion, il te plantera un couteau dans le dos, ne l’as-tu pas encore compris ? Donne-le moi et tu seras tranquille pour de bon de ce côté-là. Tu as toujours été trop gentille avec tout le monde et ça ne t’a apporté que des ennuis. Ne commets pas la grossière erreur de croire ce manipulateur, j’en sais quelque chose.
– Poséidon, ton orgueil t’aveugle. Il ne s’agit pas de justice mais bien de vengeance pour toi et je ne puis te laisser faire. Tu n’auras pas Kanon.
L’attitude du dieu changea radicalement et il eut un très mauvais sourire, lourd de sous-entendus :
– En es-tu certaine ?
Athéna ne prit même pas la peine de répondre, alors le dieu susurra :
– Très bien… Dans ce cas, peut-être que Zeus sera ravi d’apprendre ce que sa fille adorée manigance derrière son dos… Quelle déception pour lui ! Sa merveilleuse Athéna complotant contre sa loi avec d’autres Olympiens…
La déesse sentit une bouffée de colère et de crainte mêlée l’envahir et elle s’exclama :
– Je te savais retors et impitoyable, mais jamais je n’aurais cru que tu serais suffisamment lâche pour préparer un coup aussi bas ! Es-tu donc prêt à perdre tout honneur à vouloir te venger ainsi d’un simple mortel ?
Les yeux bleus venaient de gagner une lueur de convoitise au milieu de la glace et de la haine et il rétorqua, amusé :
– Tous les moyens sont bons, seul le résultat compte. J’irai jusqu’au bout s’il le faut. C’est à toi de te montrer raisonnable.
Au moment où la déesse allait lui répondre, la porte s’ouvrit de nouveau, laissant entrer un homme grand, à la longue chevelure turquoise indisciplinée, reconnaissable entre tous. Poséidon s’était retourné et aussitôt, une expression de joie féroce se peignit sur son visage alors qu’il constatait sur un ton exagérément ravi :
– Tiens ! Qui donc que voilà… Juste au bon moment…
Athéna serra son sceptre au point de faire blanchir ses articulations alors qu’elle s’écriait avec angoisse :
– Kanon !
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